Spinoza B.
 
 
 

action
L'acte de Valéry est une rigueur naissante ; la rigueur de Spinoza est un acte né, stérile. Spinoza se nourrit de mots creux et usés (là où Heidegger, au bas mot, en trouve de pleins et neufs) ; Valéry - d'images réalisables, de concepts vitaux excitant l'intelligence.
esprit,idée,mot,représentation

action
La fidélité au désir ou son sacrifice, l'épicurien ou le stoïcien, auraient pu s'équivaloir si, au lieu de s'intéresser à la volonté, c'est à dire à l'inertie ou à la fuite en avant, ils se penchaient sur la puissance, c'est à dire sur l'intensité et son retour éternel ; c'est ainsi que Nietzsche interpréta la misérable idée spinoziste : la béatitude (le conatus) résiderait dans l'augmentation (le progrès, donc, – à l'opposé de l'éternel retour) de la puissance d'agir, tandis que, pour Nietzsche, il s'agit de la puissance de rêver. Comme quoi, les (pseudo-)parentés philosophiques se fondent sur les mots et non pas sur le sens.
bonheur,continuité,élan,éternité,mot,philosophie,retour,rêve,sacrifice

action
Le culte de l'avant-dernier pas a des noms malheureusement compromis : avant-décision - hypo-crisie, ou avant-jugement - pré-jugé (l'exemple célèbre est donné par la mort, qui, aux yeux de Dieu, n'est qu'un pré-jugé, Vor-Urteil - Nietzsche). Il ressemble au désir d'Aristote ou Spinoza - vision des fins dépourvue de moyens - mais je l'associe plutôt au repérage de contraintes. Cette recherche débouche souvent sur un autre nom compromis : la scolastique - la noble oisiveté.
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action
L'action s'ensuit d'une inertie intéressée, et la passion – d'un élan désintéressé. Pour ce sot de Spinoza : « Les actions de l'Esprit naissent des seules idées adéquates, mais les passions dépendent des seules idées inadéquates » - « Mentis actiones ex solis ideis adæquatis oriuntur, passiones autem a solis inadæquatis pendent ». Ce sont les idées qui naissent de l'esprit ou des passions et non pas l'inverse. La passion est un attribut d'un esprit se muant en âme (mais Spinoza ne connaît que mens et ignore anima). Et l'adéquation n'a rien d'absolu, mais repose sur la rigueur des représentations et interprétations, où le libre arbitre, et non pas la fichue autonomie, est roi. Un bel esprit se réveille dans les impasses, inquiétantes et initiatiques, et non pas dans de doucettes certitudes intermédiaires.
âme,commencement,concept,continuité,élan,erreur,esprit,idée,interprétation,liberté,…

action
L'action met en jeu mes forces communes, elle produit ; le bilan se situe entre l'arrogance et l'humiliation. Le rêve exprime mes faiblesses innées, il crée ; le bilan me bouleverse par l'angoisse ou la béatitude. Pour les robots, c'est beaucoup plus simple : « La Joie : la contemplation de notre puissance d'agir » - Spinoza - « Lætitia : suam agendi potentiam contemplatur ». Tout le contraire de Narcisse qui se contemple soi-même.
angoisse,bonheur,création,force,mouton,regard,robot,simplicité

action
La même nécessité d'action se lit dans le conatus spinoziste, la volonté schopenhauerienne ou nietzschéenne, l'élan vital bergsonien. Mais sa nature peut être soit mécanique soit organique : soit développer l'idée par un discours sans vie, soit envelopper le discours du souffle de l'idée. La cohérence discursive du pouvoir ou l'intensité inchoative du vouloir. La puissance de la volonté ou la volonté de puissance.
continuité,discursif,élan,force,idée,intensité,nécessité,robot,valoir,vie

spinoza b.
Humanas actiones non ridere, non lugere, neque detestare, sed intellegere !

Ne pas railler, ne pas déplorer ni maudire, mais comprendre les actions des hommes !
action
Déjà, cette méchante raison dicta à Horace son nil admirari. En élevant le débat au second degré, on peut te donner raison : nos plus forts sentiments devraient être réservés aux choses invisibles. Aux visibles, mieux convient l'ironie que l'extase. Mais l'ironie est une tonalité de mon message aux autres, elle n'a aucun sens, quand j'apostrophe moi-même. Face à moi-même, et même à mes actions, je ne peux que rire ou pleurer. Les vraies questions naissent du rire divin ou des pleurs humains.
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pessõa f.
J'ai triomphé de tout là, où je ne suis jamais allé.
action
Je réserve mes fêtes au pays des rêves, ouvert aux pérégrinations de l'âme, mais vulnérable au piétinement des pieds, y compris des miens propres. Dans l'immobilité je ne triomphe que d'une contrainte, mais dans la défaite finale, au tournant des saisons, je garderai la même intranquillité, cette grâce négative si bien rendue par fluctuatio animae (Spinoza) ou cette pesanteur positive - par uneasiness (Locke).
âme,angoisse,auteur,climat,contrainte,défaite,grâce,immobilité,ouvert,rêve

amour
Plus j'aime ce qui n'existe pas, plus je suis seul ; le plus grand absent, Dieu, généralise cette règle : « Qui aime Dieu ne doit s'attendre à en être aimé » - Spinoza - « Qui Deum amat conari non potest ut Deus ipsum contra amet » - plus je m'en approche (prodeo pro Deo), plus je suis invisible, même pour un cartésien, « caché devant Dieu » ou « masqué, pour être comme Dieu - larvatus pro Deo ».
auteur,dieu,inconnu,solitude

amour
Si je devais interpréter âme selon Aristote, passion selon Descartes, désir (conatus) selon Spinoza, rire selon Kant, esprit selon Hegel, liberté selon Sartre, amour selon Barthes, je me réfugierais plutôt dans l'impassible, le décervelé, le servile et le végétal.
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amour
Deux infâmes charlatans réduisent nos passions, respectivement, à la raison (« À toutes les actions, auxquelles tu es déterminé par une passion, tu peux l'être sans elle par la raison » - Spinoza - « Ad omnes actiones, ad quas ex passione, determinamur, possumus absque eo a ratione determinari ») ou aux glandes (les passions de l'esprit comme répressions ou suppressions - Freud - Unterdrückung ou Verdrängung) ; à un noble esclavage ils préfèrent une pâle liberté de robot ou une sale liberté de cochon.
action,liberté,mouton,noblesse,platitude,raison,robot

amour
D'Aristote à Leibniz, en passant par Plotin et Spinoza, cette ineptie : le but de la philosophie serait de nous apprendre ce qu'il faut aimer. Celui qui sait, qu'on ne peut aimer que ce qu'on ne connaît pas, s'en rit. L'amour est une espèce mystérieuse du Bien inexplicable ; et la philosophie, cette protectrice des mystères, devrait nous apprendre à nous contenter d'un fol amour, autrement dit – à nous consoler. Non pas à ouvrir, mais à fermer nos yeux.
bien,consolation,folie,inconnu,mystère,philosophie,savoir

amour
Les plus nobles des passions se moquent de la connaissance ; les danses de celles-là se passent des béquilles de celle-ci. Et Spinoza a presque raison : « Les passions marquent toujours une connaissance mutilée » - « Passiones semper indicant contra nostram mutilatam cognitionem » - seulement il prend une cause pour un effet.
danse,élan,noblesse,savoir

amour
Derrière toute extase d’artiste ou d’amoureux, il y a toujours, directement ou non, un objet réel associé, auquel il faut porter ta reconnaissance ou ta chaleur. Mais ce n’est pas l’objet aléatoire de ton imitation ou de tes caresses qu’il faille y vénérer, mais la création inspirée de ton âme ou la passion incompréhensible de ton cœur. Pour les sots, évidemment, notre félicité réside « dans la sorte d’objet auquel nous sommes attachés par l’amour » - Spinoza - « in qualitate obiecti, cui adhaeremus amore ». On crée ou l’on aime, dans le Beau mystérieux – au-delà du problème du bien palpable.
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amour
Le cœur et l'ancre forment la croix camarguaise – les trois vertus théologales réunies (comme dans les seuls prénoms féminins proprement russes - Вера, Надежда, Любовь). La croix et l'encre sont pour nous, et nous ne partagerions avec le Christ que le cœur, puisque Lui, d'après Thomas d'Aquin, Il n'eut ni foi ni espérance, mais le seul amour. L'éventail évangélique y ajoute Verbe et Vérité, la grisaille spinoziste - Nature, Substance, Attributs. Les plus rusés se contentent de synonymes aussi inexistants que Dieu lui-même, par exemple - Être.
christianisme,cœur,concept,espérance,être,nature,religion,russie

art
L'étrange surdité du goût chez ceux qui en ont pourtant une bonne vue : Platon préférant les généraux aux poètes, Nietzsche reconnaissant son devancier en Spinoza, Nabokov sélectionnant Robbe-Grillet, Valéry et ses faux modèles de Descartes et de Mallarmé, Cioran en admirateur de Saint-Simon ou Fitzgerald, G.Steiner voyant le plus grand génie du siècle en Proust (qui est pire que Saint-Simon, tout en pratiquant la même tonalité sirupeuse et nauséabonde).
gloire,goût,grandeur

art
On ne peut plus imaginer un auteur, qui aurait du succès avec ses épanchements mélancoliques ; l'attente générale se converge vers l'hilarité picaresque. Le mode nostalgique des héros et des poètes (et même de Chaplin ou de de Funès) est mort, puisqu'il n'y a plus ni héros ni poètes. Les hommes retinrent la leçon de l'éducateur des robots : « Par mal, j'entends toute forme de tristesse » - Spinoza - « Per malum intelligo omne tristitiæ genus » - le bien mécanique déborde de jovialité.
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art
La métaphore règne aussi bien en poésie qu'en prose et en philosophie ; elle s'attaque, respectivement, au langage, à la représentation ou à la réalité. Les plus connues des métaphores de la réalité : Dieu (pour tous les angoissés), l'Être (de Parménide à Heidegger), l'Idée (Platon), les catégories (Aristote), la perfection (de Spinoza à Valéry), la pensée (Descartes), la chose en soi (Kant), la volonté (Schopenhauer), l'intensité (Nietzsche).
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art
Le goût de la perfection est un état d’esprit impossible, seule la réalité étant parfaite. Cioran, bêtement, le voyait chez Valéry, en y reconnaissant même un désastre (mais pourquoi ne salues-tu pas le désastre, que les vaincus inscrivent dans leurs bréviaires ?). Dans l’art, ce qui est le proche de la perfection du réel, c’est la musique. Et effectivement, tout goût, indifférent à la musique, mène au journalisme, au présentisme, à la routine. Que la perfection, c'est la réalité, fut connu et de Spinoza (« perfectio est gradus realitatis »), et de Nietzsche (« die Welt ist vollkommen ») et des sages orientaux de l'immanence (le bon chrétien, lui, place la perfection dans la transcendance, que Nietzsche appelle surhomme). Et la nature parfaite d'Aristote est un pléonasme. Musil : « une vie parfaite rendrait l'art inutile » - « das vollkommene Leben wäre das Ende der Kunst » - se trompe également.
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heidegger m.
Zeigt sich ein Pfad, der in ein Zusammengehören des Dichtens und des Denkens führt ?

Où es-tu, chemin de la rencontre du poème et du théorème ?
art
Ensemble, on ne peut que les lire. Une fois clivés, le poème se danse en pointillés d'images ; le théorème se condense en un point d'ancrage. Ton poème hors chorales vaut mieux que les théorèmes de morale (Spinoza et Hobbes).
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bien
La misérable géométrie spinoziste trace un parallélisme entre le Bien et la joie, entre le mal et la tristesse ; mais le plus grand Bien fut toujours accompagné de la plus grande tristesse, pour trois raisons : source mystérieuse, traduction problématique en actes, caractère passager de la solution trouvée.
action,mal,mélancolie,mystère,temps

bien
Ce qui me rendit le Bien sujet digne de curiosité, c'est l'unique cafouillage, chez les sages, pour le définir : « la connaissance des choses » - Sénèque ; « ce qui est utile » - Spinoza ; « ce qui élève et valorise » - Goethe. Mais je ne peux pas le voir comme « ombres furtives, accablements humides, nuages fugitifs » - Nietzsche - « Zwischen-Schatten, feuchte Trübsale, Zieh-Wolken ».
balance,auteur,mélancolie,ombre,philosophie,savoir,utilité

bien
Il existent les libertés mécanique, politique, intellectuelle, morale, mais la liberté tout court, la liberté abstraite, est indéfinissable. Spinoza, voulant cerner celle-ci, ne décrit que la liberté des robots : « J'appelle libre une chose qui est et agit par la seule nécessité de sa nature, contrainte, celle qui est déterminée par une autre » - « Liberam esse rem dico, quae ex solae suae naturae necessitate existit, et agit ; coaectam autem, quae ab alio determinatur ». Aujourd'hui, tout âne de Buridan apprit à jeter des dés et se proclame libre. La liberté morale est l'acceptation de nobles contraintes : fidélité à la haute faiblesse ou sacrifice de la force profonde, et donc l'accord avec ses passions. Il faut choisir entre le nécessaire des esclaves ou le possible de l'homme libre.
contrainte,liberté,nature,nécessité,noblesse,robot

bien
Les Idées pour Platon, Dieu pour Spinoza, le Beau et le Bien pour moi-même, ce sont des essences sans existence, des contraintes sublimes sans fins atteignables, l'exercice et la volupté de notre liberté, la musique interne naissant de la lecture mystique des notes indéchiffrables externes.
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bien
L'humanisme, c'est la découverte du Bien et du Mal – Rousseau, Nietzsche, Tolstoï – la morale. Aristote, Platon, Jésus, Spinoza ne parlent que du bon et du mauvais – l'éthique.
humanisme,mal

bien
Ma liberté éthique peut être pragmatique ou mystique. Dans le premier cas, le choix libre coïnciderait avec la poursuite de mes intérêts rationnels. Dans le second, le choix impliquerait un sacrifice de ces intérêts. Je ne prouve ma liberté que dans ce second cas. Et que penser de cette liberté : « tu es libre, quand c'est par toi seul que tu es déterminé à agir » (« res libera dicitur quæ a se sola ad agendum determinatur » - Spinoza) ? - mais c'est la définition même du comportement robotique ! Même un robot coopératif est plus humain…
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bien
La liberté banale se manifeste dans tous nos actes, pensées, résolutions ; mais la liberté la plus noble et la plus mystérieuse consiste, en toute conscience, à s’opposer à la raison. Et je sais, que notre sage siècle pense, que ne sont libres que ceux qui « se font guider par la raison » - Spinoza - « sola ducitur ratione ». Toutefois, traitée par l’ironie, cette sentence peut devenir juste. Qui est exclu de cette coterie ? - les serviteurs de Dieu, les esclaves de l'amour, les bateliers de l'art. Qui y reste ? - les robots que devinrent nos contemporains, repus de liberté.
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bien
Que diriez-vous de celui qui nie le libre arbitre, la finalité, l’ordre moral, l’altruisme, le mal ? Comme moi, vous diriez, évidemment, que c’est un idiot de village, un étudiant renvoyé d’une faculté de logique, Buvard ou Pécuchet. Pourtant, c’est ce qu’admirerait Nietzsche chez cette araignée qu’est Spinoza !
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bien
Du point de vue éthique, on arrive, tôt ou tard, à cette affligeante conclusion : ce qui agit, ce ne sont ni les idées (Platon), ni l’âme (Spinoza), ni l’esprit (Leibniz), mais bien les bras, l’intérêt, le calcul – ideae mensque non agunt. Les métaphores n’ont aucun poids en éthique ; comme la gentillesse – en esthétique.
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bien
La voix du Bien est incompréhensible, divine ; et agir, selon elle, c’est être irresponsable et donc libre. Ce qu’on comprend rend responsable et servile (et non pas libre, comme le pensent tous les spinozistes).
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bien
Les imbéciles ne connaissent ni une joie débordante ni un noble chagrin. « La gaîté ne peut être excessive, mais est toujours bonne ; la mélancolie, au contraire, est toujours mauvaise » - Spinoza - « Hilaritas excessum habere nequit, sed semper bona est ; et contra melancholia semper mala ».
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spinoza b.
Nulla actio bona aut mala est, sed una eademque actio jam bona jam mala est.

Aucune action n'est bonne ou mauvaise, mais une seule et même action est tantôt bonne, tantôt mauvaise.
bien
Cette nuance est pire que le gros trait initial : faire d'un dogmatique - un cynique. Dans l'action, la conscience, ce Bien inapplicable, impuissant, immobile et intemporel, percevra le mal inhérent à tout bras et à tout pas. Être bon, c’est écouter la voix du Bien divin et rester immobile ; être bon à quelque chose, c’est écouter la voix de son époque et d’y répondre, en agissant.
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spinoza b.
Inquirere an aliquid daretur, quo invento et acquisito continua ac summa in aeternum fruerer laetitia.

Chercher un Bien dont la découverte et la possession eussent pour fruit une éternité de joie continue et souveraine.
bien
Un galimatias intégral, chaque mot n'y est qu'absurdité ! La possession de ce qui n'est qu'une étincelle, faite pour brûler dans ton âme plutôt que pour réchauffer ton esprit ! Comment s'appelle une joie, qui serait éternelle ou continue ? - l'ennui ! « Le bonheur, qui perdurerait tous les jours, me serait insupportable » - Tchékhov - « Счастья, которое продолжается изо дня в день, я не выдержу » - un malheur de doctrine vaut mieux qu'un bonheur de routine.
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spinoza b.
Commiseratio in homine, qui ex ductu rationis vivit, per se mala et inutilis est.

La pitié est, de soi, mauvaise et inutile dans une âme, qui vit selon la raison.
bien
L'âme vit selon ses passions ; se pliant devant la raison, elle devient esprit. Il faut bien gratter l'utilitariste, vivant selon la seule raison et, donc, dépourvu d'âme, pour atteindre à la première fibre compatissante.
âme,esprit,pitié,raison,utilité

cité
Quelle foule fut plus abjecte, la soviétique ou la nazie ? Celle que la peur paralysait ou celle qui ignorait la peur ? Les moutons se laissant traîner vers l'abattoir ou les robots exterminateurs ? Tout compte fait, la peur ne modifie pas grand-chose dans la nature innée de toute foule, et Spinoza : « La foule est terrible, quand elle est sans crainte » - « Terret vulgus nisi metuat » - aurait pu écrire - « sans ou avec crainte ».
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cité
Quel philosophe est considéré aujourd'hui, par les instances académiques, pur et authentique ? - celui qui remâche infiniment les inepties de Spinoza, Hegel, Husserl. Imaginez l'horreur d'un État, qui serait dirigé par de tels bavards ou robots ! Ce fut pourtant le rêve de Platon.
école,philosophie,rêve,robot

cité
Prenez les philosophes nobles – Voltaire, Marx, Nietzsche – et voyez vers où nous conduisent leurs adeptes – la terreur, la férocité, la misère. Et voici ceux, dont n'émanent que la banalité et l'ennui – Descartes, Spinoza, Kant – mais admirez leur rôle dans les sociétés démocratiques, justes et prospères.
ennui,justice,liberté,misère,noblesse,philosophie

cité
La seule liberté, non-innée et dont on est conscient, est la liberté politique. La liberté d’action nous est commune avec des amibes ; la liberté d’artiste est dans son talent. La plus noble des libertés, la liberté éthique, est mise dans notre cœur et ne doit rien à l’expérience ; la conscience du Bien est la liberté éthique même. Spinoza, comme toujours, embrouille les choses : « Si les hommes naissaient libres, ils n’auraient aucune notion du bien et du mal » - « Si homines liberi nascentur, nullum boni et mali formarent conceptum ».
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cité
Comment appelleriez-vous l’être qui n’agirait que selon la dictée de la raison (dictamina rationis) ? - oui, ce serait bien un robot. Mais c’est ainsi que Spinoza définit l’homme libre !
acquiescement,action,liberté,raison,robot

cité
Dans l’élan vital, comme dans la volonté de puissance, se rencontrent le vouloir et le pouvoir ; mais ce sont deux clans irréconciliables qui les incarnent. Dans le premier, règne un pouvoir dominateur, normatif, machiavélique ; dans le second, culminant avec Nietzsche, – un vouloir artistique, gracieux, narcissique. Spinoza : « Par vertu et puissance j’entends la même chose » - « Per virtutem et potentiam idem intelligo » - ne fait que suivre Machiavel.
art,bien,grâce,justice,valoir

cité
La liberté politique s’exerce à la lumière de la Loi, à laquelle adhère mon soi connu, comme ceux des autres ; la liberté éthique ne se manifeste que dans les ténèbres de mon soi inconnu. Pour celui qui écoute son âme, dans la seconde liberté, la plus belle, perce le Bien ; dans la première liberté, la mécanique, ne s’impose que le Vrai géométrique ; « L’homme, qui est conduit par la raison, est plus libre dans la cité que dans la solitude, où il n’obéit qu’à lui-même » - Spinoza - « Homo, qui ratione ducitur, magis in civitate, quam in solitudine, ubi sibi soli obtemperat, liber est ».
âme,beauté,bien,hommes,inconnu,liberté,mouton,ombre,raison,robot,…

cité
Les tyrans aimeraient qu’on s’adonne, passionnément, à une servitude aveugle et béate ; la démocratie cultive l’adhésion réfléchie et dépassionnée. Dieu même serait un démocrate, puisque, selon Descartes et Spinoza, il pratique une liberté d’indifférence.
dieu,élan,ironie,liberté,raison

doute
Étranges étiquettes - « inutile et incertain » - que Pascal attribue à Descartes, tandis que celui-ci n'est justement qu'utile et certain. Comme ce lourdaud de Spinoza bourré de connaissances pratiques et traité par Voltaire de « subtil et creux ».
goût,intelligence,platitude,savoir,simplicité,utilité,vide

doute
Il est facile de donner un sens à toute négation ; l'affirmation, elle, même de lieux communs, est plus ardue et moins gratuite, mais elle ne vaut que par ce qu'elle nie (Spinoza ou Hegel). « Omnis determinatio negatio est ».
négation,platitude,raison

doute
Les soi-disant systèmes philosophiques sont des leurres, créés par des commentateurs ; les édifices des fragmentaires (Héraclite, Platon, Pascal, Nietzsche, Valéry) ne sont pas moins bien membrés que ceux des globalisants (Aristote, Spinoza, Hegel, Sartre) ; je dirais même que la part des balbutiements et des tâtonnements est plus importante chez les seconds, tandis que la qualité des métaphores est nettement supérieure chez les premiers.
continuité,élite,maxime,métaphore,système

doute
Est charlatan celui qui, d'une hypothèse parmi d'autres, fait un principe unique ; des charlatans notoires, pris en grippe par Nabokov - Spinoza, Marx, Freud (charlatans du soupçon), ou par Schopenhauer - Schelling, Hegel (plumpe Scharlatane, tandis que sa propre lourdeur fut du même acabit).
commencement,savoir,style

doute
Depuis Spinoza, le mode géométrique fut essayé soit pour s'amuser avec son intelligence (Wittgenstein), soit pour amuser les autres avec sa bêtise, par exemple : « J'entends par littérature, non un corps ou une suite d'œuvres, mais le graphe des traces » - Barthes - elle n'est non plus ni groupe commutatif ni anneau associatif ni idéal distributif. Au lieu d'énoncer des inepties en analyse discrète, tu aurais dû exercer tes douteuses lumières en synthèses concrètes. Cette définition me rappelle une autre intrusion ébahissante, non pas dans l'algèbre, cette fois, mais dans la théorie des ensembles, d'un ontologue déchaîné : « L'ensemble vide est le nom propre de l'être en tant qu'être » - le nom commun de cet être en tant que néant (un jargon que partagent Hegel et Sartre) étant - l'ânerie, dont se moquent les logiciens et les mathématiciens.
être,intelligence,ironie,ombre,système

doute
Tout le monde doute, tout le monde ne voit plus de miracles dans le vivant – le monde est donc cartésien et spinoziste. Une raison de plus pour me rapprocher des fanatiques du verbe acquiescent et des thuriféraires du sentiment rebelle.
fanatisme,philosophie,sentiment,vie

doute
La scolastique, la superstition, l'ignorance – pour moi, l'homme du XXI-me siècle, est-ce un adversaire valable ? C'est ridicule. Pourtant, le seul mérite de Descartes, de Spinoza, de Hegel fut de s'élever contre ces sottises. Doit-on les admirer aujourd'hui, pour cela ? Ce serait un anachronisme.
école,intelligence,lutte,moyen âge,savoir,temps

doute
Valéry n'a aucune ambition pour la rigueur d'un système, et pourtant ses phrases sont rigoureuses, et derrière elles on peut reconstituer facilement un système complet, profond et subtil, qui l'inspire. Tout, chez Nietzsche, n'est que rhapsodique, mais on y entend une symphonie, grandiose et harmonieuse. Spinoza, Kant, Hegel brandissent leur prétention à la rigueur scientifique, mais chacune de leurs phrases est un fatras anti-conceptuel, anti-logique, anti-poétique, où tout n'est que verbiage, hasard, irresponsabilité, arbitraire, que même le sens commun réfute sans peine, retourne ou s'en moque.
école,idée,jeu,musique,philosophie,poésie,science,système

doute
Tu te perds de plus en plus dans les mystères du vivant, où tu écartes, d'abord, toutes les réponses mécaniques, ensuite tu te dégages même des questions savantes mais insolubles. Et puis tu tombes sur un imbécile, docte et serein, qui, sans ciller, t'assure que « tout ce qui concerne la vraie vie s'établit aisément à partir des Propositions 37 et 46 » - Spinoza - « omnia quæ ad veram vitam spectant, facile ex propositione 37 et 46 hujus partis convincuntur ». Et c'est en compagnie de ces robots impassibles que tu vivras tes dernières extases d'ahuri.
inconnu,intelligence,mystère,question,robot,vie

doute
J’oublie, qu’à côté de la réalité (le savoir pragmatique) et du rêve (le vouloir romantique), il existe un troisième séjour de nos lubies – l’idéologie (le pouvoir politique). Ainsi, après la logorrhée scolastique sur l’Un, l’Être, Dieu, l’omniscience, l’omnipotence, la vérité – la banalité cartésienne ou les finasseries spinozistes sont perçues comme presque anti-chambres du réel ou du rêvé. Hegel nous replonge dans le délire.
dieu,être,force,moyen âge,réalité,rêve,savoir,valoir,vérité

doute
Il n'y a rien à réfuter chez un Spinoza - c'est du verbiage gratuit, prétentieux et creux ; mais essayez de réfuter Nietzsche ! - c'est toujours passionnant et exige une grande rigueur ; pourtant, c'est lui qui se moquait le plus des rigoristes, comme Platon - des poètes ; mais c'est bien chez ces deux-là qu'on trouve de la rigueur et de la poésie.
négation,poésie,science

spinoza b.
Qui se suosque affectus intelligit, lætatur…

Bienheureux celui qui se comprend soi-même et comprend ses sentiments…
doute
Cette funeste illusion d'un soi transparent rendit vos joies et vos yeux bien secs. Je me sens le plus près de moi-même, quand je suis dans une bienheureuse perplexité
auteur,bonheur,regard,sentiment,soi

spinoza b.
Affectus qui passio est, desinit esse passio simulatque ejus claram et distinctam formamus ideam.

Une affection cesse d'être une passion, sitôt que nous nous en formons une idée claire et distincte.
doute
L'affection peut changer de coordonnées, tout en gardant la singularité de ses reliefs. La vraie dimension d'une passion est la hauteur, où toute idée, obscure ou lumineuse, devrait être entraînée. « Que votre âme élève votre raison à la hauteur de la passion »* - Gibran - « Let your soul exalt your reason to the height of passion ».
âme,amour,axe,balance,hauteur,idée,ombre,raison

hommes
L'humilité est le contraire du culte de méritocratie : reconnaître qu'il existe des hommes plus dignes de ma fortune, et qui sont plus malheureux que moi (les méritocrates en sortent avec davantage d'orgueil ou de cynisme). Donc, être humble, ce n'est pas reconnaître quelqu'un plus puissant (Spinoza, l'humilité des chiens : « L'humilité est une tristesse, l'homme contemplant son impuissance » - « Humilitas est tristitia, homo suam impotentiam contemplatur »), mais, au contraire, - plus digne, quoique plus faible (l'humilité du fort).
acquiescement,force,grandeur,justice,mélancolie

hommes
Du temps de Descartes et Spinoza, la raison fut bafouée par le dogmatisme et la superstition ; mais aujourd'hui, où la raison triomphante étouffa toute forme de sensibilité, être cartésien ou spinoziste est signe d'un cerveau robotisé.
école,fanatisme,modernité,raison,robot,sentiment

hommes
Si je me soucie de mon propre arbre autant que de la forêt humaine, je mettrai à côté de la Haine du reproductif - ma Honte productive, et c'est sur cet axe que je composerai la musique de mes fureurs. Pour l'un des philosophes les moins musicaux, Spinoza, la haine et le remords furent les deux ennemis fondamentaux du genre humain. J'avoue y succomber, avec mon odium humani generis, et je vous laisse avec votre indifférence et votre paix d'âme. Le remords, si bien senti par Baudelaire, est une forme accidentelle, dont la honte est le fond primordial.
angoisse,arbre,auteur,haine,honte,musique,style

hommes
Aucun sot ne peut imiter l'intelligence de Valéry, aucun non-artiste ne peut atteindre l'intensité de Nietzsche, aucun non-styliste ne peut briller comme Cioran. Quand je vois des foules d'épigones, relevant de ces trois catégories d'incapables et reproduisant très précisément les démarches de Spinoza, Hegel ou Husserl, je perds toute envie de descendre dans leurs profondeurs (qui sont plutôt des cloaques) et je reste dans la hauteur de ma belle triade.
art,auteur,hauteur,intelligence,intensité,mouton,style

hommes
Selon Spinoza, c’est dans les débits de boissons, dans les maisons de haute couture et dans les stades qu’on constate le mieux le déferlement de la sagesse : « Il appartient à l’homme sage d’utiliser des boissons, la parure, le sport » - « Sapientis est potu se reficere et ornatu, ludis exercitatoriis ».
intelligence,ironie,modernité

soloviov v.
Для всякого народа есть только два пути : языческий путь самодовольства и христианский путь самосознания.

Toute nation n'a que deux voies : celle du contentement païen de soi et celle de sa conscience chrétienne.
hommes
Elles se rejoignirent : mieux on se connaît, plus on est content. C'est seulement sur les rares voies - impasses ! - de la méconnaissance de soi que se produisent encore des conversions de la honte, loin de la voie médiane. « Les suprêmes orgueil ou dépréciation de soi sont la suprême ignorance de soi »** - Spinoza - « Maxima superbia vel abiectio est maxima sui ignorantia ».
chemin,christianisme,conscience,gloire,honte,paradoxe,savoir,soi

intelligence
Deux familles de philosophes : partant des sciences ou animés par l'art, charlatans ou poètes. Chez les premiers, deux sous-espèces : obnubilés par les sciences anecdotiques (Hegel, Marx) ou abusés par les sciences rigoureuses (Spinoza, Husserl). Chez les seconds : se tournant vers notre facette religieuse (Nietzsche), langagière (Valéry), stylistique (Cioran).
art,langue,philosophie,poésie,religion,science,style

intelligence
Le fondement d'un nouveau regard philosophique ne peut être ni logique (Spinoza et sa mathématique), ni dialectique (Hegel et sa synthèse), ni métrique (Nietzsche et sa transvaluation), ni psychanalytique (Freud et sa perversion), mais presque exclusivement métaphorique (Derrida voit en philosophie  : « une théorie de la métaphore »*** ! ). C'est pourquoi toute création, en philosophie, n'est que d'ordre poétique. Et le sujet en relève au même degré que l'objet : « L'homme est une métaphore de lui-même »** - Paz - « El hombre es una metáfora de sí mismo ».
balance,commencement,concept,création,filtre,métaphore,philosophie,poésie,raison,réalité,…

intelligence
Des jeux pseudo-logiques avec des concepts tirés au hasard des soutenances de thèses, en psychologie ou en physiologie, ce charabia insipide de la professoresque clanique, s'attachant, au gré des modes, au rationaliste le plus absolu, au charlatan de Vienne ou au dingue de Turin, mais sans leur talent, dans cette niche logomachique alimentée par Husserl et Heidegger, Sartre et Badiou, où l'on refuse à Pascal, Voltaire ou Valéry le titre de philosophe, que s'arrogent tous ces arides pontifes de faculté Barthes, Foucault, Deleuze, Ricœur, Derrida. Siècle de Dozenten et d'agrégés !
école,folie,idée,jeu,philosophie,platitude,raison,représentation

intelligence
L'être trop vague et l'avoir trop net sont à l'origine des fondations de leurs pensées. Leurs édifices sont sans charme ni vue sur l'étoile ; leur être mécanique naît du non-avoir tout aussi mécanique. Il faut laisser le devenir, du soupir ou de la prière, animer nos tours d'ivoire, sous-sols et ruines, ces séjours principaux d'une pensée organique. Je suis l'âme et j'ai un corps, le dualisme d'initiation préféré au monisme initial (Spinoza).
âme,caresse,château,commencement,étoile,être,idée,maîtrise,ruines

intelligence
Valéry se moque de la non-définition des abstractions initiales chez les philosophes, qui pratiquent « l'art d'arranger les mots indéfinissables en combinaisons agréables ». Pourtant, la philosophie est de la poésie, où une grande part du charme réside justement dans le vague des premiers et derniers pas. Il suffit de jeter un coup d'œil sur les «définitions» des plus acharnés adeptes de la rigueur - Spinoza, Hegel, Wittgenstein - pour s'assurer, qu'ils ne quittent jamais la région réservée aux élucubrations poétiques (rien d'étonnant qu'ils s'interrogent en professeurs marmoréens et répondent en poètes balbutiants). Pour discourir en paix, ils ne s'aventurent guère avec les définitions. La philosophie de la rigueur existe bien, mais elle fut exhaustivement épuisée par Aristote et Kant.
art,commencement,école,esprit,inconnu,ironie,philosophie,poésie,question

intelligence
En soi, chasser le mystère est un geste respectable, à condition de faire de même avec le problème et avec la solution, et de s'adonner à une extase purement langagière, désincarnée et despiritualisée. Le hic, c'est qu'ils mettent, à la place du mystère, d'insignifiants problèmes (Descartes) ou de minables solutions (Spinoza).
ennui,intensité,mot,mystère,sentiment

intelligence
Spinoza : résolution sans solutions, problématique sans problème, mystique sans mystère. Ourdir des systèmes, telle une araignée affairée (die Spinne), pour capturer des moucherons désœuvrés.
école,mystère,platitude,système

intelligence
Ce minable géomètre de Spinoza est persuadé, qu'il existe, dans la réalité, de vrais cercles, tandis que leur idée n'en comporterait ni circonférence ni centre (« Idea enim circuli non est aliquid, habens peripheriam et centrum »). Il n'a jamais compris, que la réalité n'est faite que des configurations d'atomes dans le temps, appréhendées par notre géométrie visionnaire et intemporelle.
réalité,représentation,temps

intelligence
L'herméneutique du profane n'a aucune chance d'apporter du sens à un résultat mathématique, dont il ne maîtrise pas le contenu. Mais le mathématicien, qui ne maîtrise pas la forme, est encore plus ridicule dans la pose de critique d'art. Quoique Spinoza fasse rire plus souvent que Bergson
art,interprétation,maîtrise,pose,style

intelligence
De Spinoza à Husserl, ces insipides et lourdes tentatives de faire de la philosophie une science rigoureuse, de lui apporter de l'étendue en la faisant parler le langage des mathèmes ; tandis que seul celui des poèmes promet de munir de hauteur son semblant de profondeur. Poétiser et philosopher sont des synonymes - être au-dessus du temporel, croire en simultanéité avec la vie et non pas au : « D'abord vivre, et philosopher - après » - « Primum vivere deinde philosophare ».
ennui,hauteur,langue,philosophie,poésie,vie

intelligence
Spinoza et Leibniz confondent, tout le temps, la représentation avec l'expression, en voyant dans les attributs (ou la monade finie) expression de la substance (de la monade infinie) et non pas représentation ; l'expression n'est qu'un mode d'accès langagier au déjà représenté.
concept,être,inconnu,langue,philosophie,représentation,style

intelligence
Les seuls attributs du réel sont quelques constantes physiques, chimiques et biologiques, fixées par le Créateur au niveau atomique ou moléculaire ; parler d'augmentation du nombre d'attributs, comme le font Descartes et Spinoza, pour approcher de l'absolu, n'a aucun sens ; les attributs non élémentaires naissent et existent exclusivement dans la représentation.
absurde,concept,dieu,matière,proximité,réalité,représentation

intelligence
Aucun philosophe n'aurait rien écrit avant Nietzsche, Valéry ou Cioran, leur œuvre garderait sa valeur intacte (contrairement à Aristote, Spinoza ou Hegel, dont l'intérêt relatif relève davantage de l'histoire de la philosophie), et sa lecture n'en deviendrait pas plus ardue - à comparer avec les connaissances philosophiques (un oxymoron insensé, puisque Foucault a raison : « Il n'y a pas de philosophie, il n'y a que des philosophes »**, tandis qu'il existe bien l'art et non seulement des artistes, puisque le sens du beau est métaphysique et celui du vrai - mécanique), se réduisant à un vocabulaire emprunté, sans rigueur ni exubérance ni hauteur, et qui seraient indispensables pour une lecture des professionnels. La seule maîtrise, dont une bonne philosophie a besoin, est celle du degré zéro de la création, de la sensibilité et de l'intelligence.
beauté,création,école,folie,histoire,maîtrise,mot,philosophie,savoir,sentiment,…

intelligence
Deux grands mérites doivent être reconnus à Descartes : n'avoir que le mépris pour le substantif être (qui fut pour lui synonyme de perfection et identique à réalité) et ne pas avoir mêlé sa culture mathématique au débat philosophique. L'ontologie est du pur verbalisme comme l'est l'appel à une pseudo-mathématique des ignares tels que Nicolas de Cuse, Spinoza, Badiou.
culture,être,mot,philosophie,réalité,science

intelligence
Qu'on soit scolastique, cartésien ou spinoziste, qu'on parte des choses vues, de l'œil ou de leur Créateur, de la matière, de l'instrument ou du Maître, - on vaudra ce que vaut son regard, c'est à dire la qualité interne de son œuvre.
élite,matière,moyen âge,regard,valoir

intelligence
Une vie d'homme est un arbre, et toute tentative de la résumer en un système philosophique, c'est réduire le chant de cette vie à une langue de bois ou réduire sa solitude primordiale à la monotonie d'une forêt. D'ailleurs, ces fichus systèmes sont, la plupart du temps, plutôt le fruit des pauvres imaginations des scoliastes que des philosophes eux-mêmes. Sauf quelques incorrigibles, tels Spinoza ou Hegel, que Schopenhauer qualifiait, à juste titre, de barbouilleurs logorrhéiques – Zusammenschmierer der Wortgefechte. Les meilleurs ne font qu'illuminer les profondeurs humaines par de hautes étincelles des métaphores.
arbre,hauteur,métaphore,musique,philosophie,solitude,système,vie

intelligence
Une définition (détermination) n'est pas un traçage de frontières (Grenzziehung de Hegel), mais une règle, qui détermine si un objet relève ou pas (negatio de Spinoza) du concept. La notion de frontière n'apparaît qu'avec une topologie et une continuité (facultatives), qui distingueront, en passant, entre l'Ouvert et le Clos.
concept,frontière,idée,ouvert,science

intelligence
Le monde, l'homme, la perception humaine du monde - trois merveilles d'un même acabit. Qu'on parte de l'homme (Protagoras, Kant, Nietzsche), du monde (Spinoza, Marx, Heidegger), de la relation entre eux (Aristote, Husserl, Sartre) - on peut aboutir au même réseau conceptuel. Ce qui différencie ces visions, ce n'est pas tant le problème des représentations et des interprétations, que la part et la qualité de l'extase, tragique ou jubilatoire, devant le mystère. L'intelligence, la noblesse, le talent - telle est l'échelle ascendante des bons esprits.
concept,élite,enthousiasme,esprit,idée,interprétation,mystère,nature,noblesse,représentation,…

intelligence
Chez les philosophes apoétiques, Descartes, Spinoza, Hegel, je ne trouve aucun sujet qui ne serait pas abordé par le poète aphilosophique Valéry ; chez celui-ci - des idées en belles phrases, chez ceux-là - de ternes phrases et de ternes idées ; les meilleurs des philosophes sont ceux qui reconnaissent, que la philosophie doit être ancilla poesiae, comme en témoignent Heraclite, Nietzsche, Heidegger.
discursif,idée,philosophie,poésie

intelligence
Tout le galimatias spinoziste autour des substances absolues et immuables est mis à nu par cet aveu, désarmant et ridiculisant : « La substance ou - ce qui est le même - ses attributs avec leurs valeurs » - « Substantias sive quod idem est earum attributa earumque affectiones », puisque les attributs (comme la plupart des substances) sont de libres constructions de nos modélisations arbitraires et non pas un contenu authentique du réel (sauf peut-être un nombre très réduit de constantes universelles). Quand on ne peut pas s'élever aux effets de soi, on s'étend en causes de soi. Causa sui est la réalité, qui dicte et valide nos représentations ; c'est ce que Heidegger nomme être. L'appeler Dieu est prendre une création pour un créateur.
authenticité,concept,création,dieu,être,matière,réalité,représentation,universel

intelligence
La méthodologie mathématique en philosophie n'a jamais rien produit d'appréciable ; la consolation ou le langage ne se traitent bien que par des métaphores. Le témoignage - les trois profanations des démarches (pseudo-)mathématiques : l'analytique aristotélicienne, la géométrie spinoziste, l'algèbre kantienne.
consolation,langue,métaphore,philosophie,science

intelligence
Tracer des frontières entre les clans ou écoles philosophiques est une tâche délicate. On peut commencer par le regard, que les philosophes eux-mêmes portent sur leurs exercices, et alors la première ligne de démarcation séparerait les scientistes des artistes. Chez les premiers, il y a deux groupes : discours léger et prétention à la sagesse (Platon, Sénèque), ou discours lourd et prétention à la rigueur scientifique (Spinoza, Hegel, Husserl). Chez les seconds, il y a aussi deux groupes : verbalisme prosaïque (Heidegger) ou intensité poétique (Nietzsche).
art,école,frontière,inconnu,philosophie,poésie,science,soi

intelligence
Dès qu'on prend pour pensées l'idée platonicienne, le cogito cartésien, le conatus spinoziste, l'éternel retour nietzschéen, on est charlatan. En reconnaissant leur vrai statut, celui des métaphores, nous devenons libres à les interpréter comme bon nous semble. Les pensées, c'est chez les poètes qu'il faut les chercher – Rilke, Valéry, Pasternak, R.Char.
art,idée,interprétation,liberté,métaphore,philosophie,poésie,retour

intelligence
Qu'est-ce qu'un objet ? - son nom, ses classes, ses relations, ses attributs. Mais ce sont des caractéristiques de la représentation et non pas de la réalité (que Platon et Spinoza m'excusent…), et elles sont les seuls points de repère permettant de référencer les objets. Dans la réalité, ainsi, il n'y a ni objets ni vérités, puisque celles-ci résultent des propositions portant sur les objets. La réalité réapparaît dans les significations qu'on tire de la proposition interprétée, mais elles naissent d'un processus non-formalisable, intuitif, non-langagier – l'intelligence pragmatique, le dernier chaînon de l'analyse syntaxico-sémantique.
concept,interprétation,langue,question,réalité,représentation,vérité

intelligence
Aristote, Spinoza, Kant - aucune belle métaphore ; il reste le système (logique, structurel ou verbal, à l'esthétique nulle), donc un résumé, qui n'est jamais qu'enfantillage (c'est à dire la curiosité de la découverte, suivie d'une sobre mémorisation et d'un morne apprentissage). En face, les mythes et idées platoniciens sont de pures métaphores éternelles, comme la plus belle d'entre elles, celle de la Caverne reprenant, peut-être, le beau souvenir du souterrain de Pythagore et d'Empédocle. Tant de prosateurs cherchèrent à embrigader cet impénitent poète, en suivant le conseil perfide de Leibniz : « Si quelqu'un réduisait Platon en système, il rendrait un grand service à l'Humanité ».
beauté,école,idée,mémoire,métaphore,platitude,ruines,système

intelligence
Descartes, Spinoza, Hegel, Husserl : tout est réduit aux langages des problèmes et aux métaphores de leurs solutions. Le langage y est misérable, et les métaphores y sont inexpressives. Une tentative d'un cogito supérieur : il y a deux mystères indubitables – le moi (un corps et un esprit) et le monde (des corps et des esprits), et il y a un troisième – ma faculté de représenter et d'interpréter les deux premiers. La résignation de ne pas s'abaisser au niveau des problèmes distingue un philosophe. C'est pourquoi le cogito phénoménologique (pré-conceptuel, pré-logique, pré-langagier, visant l'accès aux objets et donc – relationnel et pas seulement subjectif) est tout de même supérieur au cogito cartésien.
acquiescement,concept,esprit,idée,interprétation,langue,métaphore,mystère,philosophie,représentation

intelligence
L'invention face à la reproduction, le sacrifice d'un soi si insaisissable face à la fidélité à un soi bien déterminé, - dans cette opposition des poses philosophiques, la première l'emporte largement sur la seconde, en qualité et même en cohérence : il suffit d'imaginer Marc-Aurèle vanter les vertus de la force, ou Montaigne se lamenter sur la souffrance, ou Nietzsche faire l'apologie de la faiblesse, ou Tolstoï se vautrer dans l'érotisme, ou Cioran en appeler au rire ; en revanche, Spinoza, Schopenhauer ou Sartre sont dans leurs soi respectifs, ce qui les rend plus ternes. Je ne connus que deux cas, où l'écrivain et l'homme, tous les deux pleins de noblesse, vécussent main dans la main, regard sur le regard, talent du talent - R.Char et R.Debray.
élite,esprit,force,noblesse,philosophie,soi,souffrance

intelligence
Aucun commentateur ne se hisse à la hauteur de Nietzsche, Valéry, Heidegger ; tous les commentateurs de Spinoza, de Hegel, de Kierkegaard leur sont supérieurs.
hauteur,interprétation

intelligence
Aujourd’hui, un étudiant en première année d’études, apprend, en quelques semaines, ce que signifie raisonner more geometrico, ce qu’est la logique mathématique, quels sont les rapports entre celle-ci et la mathématique. Malheureusement, cet étudiant ne lira jamais Spinoza, Hegel, Badiou, pour dénoncer leurs monstrueuses impostures. Et malheureusement, dès que les mathématiciens, eux-mêmes, adoptent la pose philosophique, ils deviennent encore plus ridicules. Il n’y a plus ni Pascal ni Leibniz ni Einstein.
école,modernité,philosophie,pose,science

intelligence
En philosophie, être littérairement nul ne signifie pas nécessairement être bête. L’intelligence kantienne est incontestable ; sa vision de la raison est exhaustive, lumineuse, nous rapprochant de l’œuvre divine dans sa totalité. Mais que penser des premières certitudes cartésiennes, de la méthode géométrique spinoziste, du savoir absolu hégélien ? La nouveauté de leurs vocabulaires séduisit les contemporains, inhabitués à tant de liberté, mais situant mal les signes d’intelligence et ignares en logique. Aujourd’hui, force est de constater que ces auteurs sont des ânes.
art,dieu,ironie,langue,liberté,philosophie,raison,savoir,science

intelligence
La reconnaissance de Nietzsche, par le badaud, est due au malentendu, créé par les nazis, qui tombèrent, chez sur les mots tels que : surhomme, puissance, blonde bête. Le bouseux se flatte d’être pris pour aristocrate. Mais le malentendu avec mes bêtes noires – Descartes, Spinoza, Hegel – est beaucoup plus énigmatique : la platitude du premier, le charabia du deuxième, le galimatias du troisième : « Galimatias primitif, ânerie de Hegel, vilain et niais » - Schopenhauer - « Gallimathias, Rohheit, Unsinn des plumpen und geistlosen Hegel ».
allemagne,bassesse,force,mystère,noblesse

intelligence
Toucher aux choses grandioses (profondes ou ampoulées) est une obligation de la philosophie, mais sans la musique ni la poésie, cette approche ne peut être que soit ridicule soit ennuyeuse soit pédante, ce qui exclut de la liste des grands les non-musiciens : Aristote, Descartes, Spinoza, Kant, Hegel.
ennui,grandeur,hauteur,musique,philosophie,poésie

intelligence
Avant Newton, la mathématique, et donc la physique, s’exprimaient en balbutiements, comme, d’ailleurs, la philosophie, qui reconnaissait sa parenté, justifiée, avec la mathématique. De la notion, vague et inutile, de l’infini, Newton forgea le concept, élégant et opératoire. La logique, restant dans les approximations aristotéliciennes, un ignare en logique, Spinoza, tenta, lamentablement, d’imiter cette logique, dans ses écrits pseudo-philosophiques (où il n’y a ni logique ni géométrie). Mais les spinozistes continuent à chercher une mathématisation de la philosophie. La philosophie perdit ses hautes ailes poétiques et ne maîtrisa jamais les profondes racines mathématiques.
hauteur,histoire,inconnu,philosophie,poésie,science

intelligence
Descartes énumère des banalités organiques, Spinoza assène des bêtises mécaniques ; le premier ne m'inspire qu'indifférence, tandis qu'au second je réagis avec une franche détestation.
haine,robot

intelligence
Parmi les liens sémantiques, les plus vagues et protéiformes, plutôt pragmatiques que sémantiques, sont la causalité et la composition ; pourtant, ce sont ces vétilles que choisit Spinoza, pour définir l’essence de la Substance - ridicule ! Et Kant, en voyant dans la causalité une relation a priori, n’est guère plus brillant.
dieu,être,représentation

intelligence
Dans l’œuvre de tout grand philosophe on peut reconnaître un système, vaste, solide, profond, et même, dans le meilleur des cas, - altier. Ce système ne peut être qu’un constat, un résumé a posteriori des ouvrages, dont le commencement aurait été dicté par le choix d’un ton, d’une hauteur, d’une noblesse et non pas des dogmes a priori. Toutes les tentatives de partir d’un système (Descartes, Spinoza, Hegel) débouchent sur la banalité, la platitude, le galimatias. Dans les notes fragmentaires de Dostoïevsky, Nietzsche, Valéry, en revanche, on reconnaît, nettement, un système, un vrai monde de l’esprit. « Le fragment n’est rebuffé que par ceux qui croient en systèmes de création » - S.Zweig - « Das Fragmentarische erschreckt nur den, der an Systeme im Schöpferischen glaubt » - il est permis d’y croire (en rêve), mais non de penser (en actes) selon un système.
commencement,création,esprit,hauteur,maxime,noblesse,philosophie,platitude,rêve,système

intelligence
Aristote et Kant eurent beau avertir les philosophes, que sans une bonne représentation tout discours ne peut être que du verbiage – Spinoza et Hegel tombèrent dans ce piège. Et tout effort interprétatif, sans une base conceptuelle, dégénère en bêtises irresponsables ; et c’est dans ce deuxième piège, qu’ils dégringolèrent.
concept,défaite,erreur,interprétation,maîtrise,philosophie,représentation

intelligence
L’esprit est, avant tout, un créateur de langages, et sachant naviguer entre eux, il n’a pas peur de contradictions, puisque celles-ci se réduisent, dans les cas intéressants, au changement de langage. La mathématique est, en permanence, sous la surveillance d’un méta-langage qui est la logique, et donc la contradiction lui est interdite. Le mode géométrique ne s’applique qu’à la mathématique, ce que ne comprend pas Spinoza, qui, dans ses élucubrations, vise la rigueur et « la même liberté d'esprit dont on use en mathématiques » - « eadem animi libertate, qua res Mathematicas ».
création,esprit,langue,liberté,science

intelligence
Spinoza cherche à cerner la consolation, et Wittgenstein – le langage. Deux tentatives ratées, puisque l’un ignore la place de la tragédie dans le rêve et l’autre – celle de la représentation dans le discours.
consolation,défaite,discursif,langue,philosophie,représentation,rêve,tragédie

spinoza b.
Ordo et connectio idearum idem est ac ordo et connectio rerum.

L'ordre et la connexion des idées sont les mêmes que l'ordre et la connexion des choses.
intelligence
L'une de ces inepties dont grouille le spinozisme ! Ici – une assimilation, aussi absurde que la désassimilation entre le corps et l'âme. Dans la réalité, il n'y a que des choses ; dans la représentation, il y a des objets et des relations ; dans le langage, ce porte-parole des idées, les connexions sont de nature langagière ou représentative – rien à avoir avec les choses réelles. Et le corps, qui jouit ou souffre, peut déterminer l'âme à penser, et l'âme, qui évalue ou s'élève, peut déterminer le corps à bouger – contrairement à ce qu'édicte ce charlatan du Nord.
absurde,âme,concept,idée,ordre,réalité,représentation,souffrance

ironie
Celui qui dit, que Spinoza est le plus grand des philosophes, a la même image à mes yeux que celui qui tient Nostradamus pour le plus grand prophète et Freud pour le meilleur connaisseur de l'âme humaine - un charlatanisme génialement réussi à travers un langage violemment neuf. Serait-ce un trait commun des meilleurs des métèques, des Juifs ?
âme,auteur,hommes,mot,philosophie

ironie
Quand on évalue l'ennui de ne trouver autour de soi que ce qui existe, ou, pire, l'horreur d'être cerné uniquement par ce qui cogite, on reconnaît à Descartes l'immense mérite d'un dualisme vivifiant, se moquant et de la logique et de l'Histoire. Avec lui, enfin, on peut penser l'inexistant et exister sans penser. Et en bon mathématicien, contrairement à Nicolas de Cuse ou à Spinoza, il n'abandonne pas l'homme aux seuls réalité ou langage, mais le force à passer par la représentation.
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ironie
Qui aboie ? Le chien ou son concept ? Le chien réel émet des ondes acoustiques, perçues par des micros ou des oreilles ; le concept d'aboyer correspond au lien sémantique, défini dans la représentation et attaché au concept de chien. Donc, ce n'est pas celui qu'on pense (Spinoza) qui aboie.
idée,ouïe,réalité,représentation

ironie
Que la gent spinoziste est constituée, essentiellement, par l'idiot du village, se voit dans cette ahurissante confession de l'un d'eux : « M'inscrire dans l'être par une œuvre qui dépasserait le temps, servir un public et le convaincre de la pertinence de ma réflexion par sa cohérence » - je ne sais pas ce qui y est le plus comique et répugnant : l'idiotie et la misère du style, l'idiotie et la mesquinerie de l'ambition, l'idiotie et la sénilité de la cervelle ?
grandeur,intelligence,modernité,philosophie,style

ironie
Quand on sait munir ses formules de bons coefficients vibratoires, on peut même oublier tout opérande et s'enivrer d'opérateurs. Mais le pire, c'est la narration ordine geometrico : « Je parlerai des sentiments humains comme des lignes et des surfaces » - Spinoza - « Humanas appetitus considerabo perinde ac si quæstio de lineis aut planis esset ».
balance,discursif,raison,robot,sentiment

ironie
Ce qu'on peut comprendre sans enthousiasme ni dégoût ne vaut généralement pas grand-chose. Ce monde sans admiration, bien compris et sans révolte, est le monde d'aujourd'hui. Dans la devise spinoziste (Nil mirari, nil indignari, sed intellegere !) se cache peut-être une ironie, qui rend cette diatribe bien ridicule. Plus que les moyens, c'est le but, acquiescentia animi, une bonne conscience, qui m'y donne de l'urticaire.
acquiescement,conscience,contrainte,élan,enthousiasme,lutte,modernité,raison,regard,révolte

ironie
La rareté augmente le prix, et le progrès - de l'homogène à l'hétérogène – les fait flamber, tandis que l'ironie - de l'hétérogène à l'homogène - déprécie les marchandises en les mettant sur le même rayon. Les choses les plus rares sont sans prix. La noblesse, par exemple. Et, en plus, ce qui est rare pour l’esprit profond est beau pour l’âme hautaine (Valéry) ; l’inverse : « Tout ce qui est sublime est aussi difficile que rare » - Spinoza - « Omnia praeclara tam difficilia quam rara sunt » serait aussi vrai. Le respect du rare serait signe de la culture : « L’humanité ne grandit que par la vénération du rare » - Nietzsche - « Verehrung des Seltenen, durch die allein die Menschheit wachse ».
âme,amour,balance,beauté,culture,esprit,grandeur,hommes,négation,noblesse,…

ironie
Quand je vois, avec quelle facilité, des tas d'hommes, privés de tout talent littéraire, empruntent le style et le vocabulaire de Spinoza, Hegel, Husserl, je comprends mieux le talent singulier de Pascal, Nietzsche ou Valéry, qui n'ont aucun véritable acolyte.
art,école,mot,style

ironie
Seule la maîtrise des métaphores ou de la logique peuvent justifier la logorrhée philosophesque sur la vérité, les connaissances, l’être. Si de la sagesse spinoziste ou hégélienne, on élimine ses trois sujets austères ou stériles, les misérables lambeaux restants ne seraient sauvés par aucune métaphore.
être,intelligence,métaphore,philosophie,savoir,science,vérité

ironie
Pauvre Nature, géométrisée par Descartes et déifiée par Spinoza ! Pauvre Nature, profanée par l’austère Naturphilosophie des rats de bibliothèques allemands ! La prose de Lucrèce, après ces bavards, semble bien relever de la poésie.
allemagne,dieu,école,nature,poésie,science

ironie
On peut juger de la monstruosité des abstractions spinozistes ou hégéliennes par cette perle (parodique?) valéryenne : « Dans ce cycle de transformations – la spécialisation, les restrictions et exclusions fonctionnelles, la polarisation, la coordination, la variance d’un système hétérogène, les échanges entre motilité, réflexes ». S’agit-il d’un tracteur qu’on met en marche ? Du remplacement d’un lavabo ? De l’écorchement d’un serpent ? Raté ! - ce sont des spécifications de l’acte sexuel !
caresse,philosophie

ironie
Aucun non-mathématicien n’a jamais formulé quelque chose de philosophiquement profond ou divinement haut sur la nature de la démarche mathématique (ni Spinoza ni Valéry ni Wittgenstein ni A.Badiou). Mais les mêmes tentatives des mathématiciens eux-mêmes débouchent dans de franches platitudes. Einstein, ni mathématicien ni philosophe, est le seul à avoir la-dessus des avis enthousiasmants.
dieu,enthousiasme,hauteur,philosophie,platitude,science

mot
Je lis cette traduction cathédralesque de Spinoza : « La liberté s'oppose à la contrainte et non à la Nécessité » - monumental, beau et faux ; j'échafaude une savante réplique, du genre : la liberté est peut-être une nécessité extérieure ; la contrainte doit être une nécessité intérieure (tout en remarquant, au passage, le gouffre entre nécessité-loi et nécessité-besoin) ; au dernier moment je m'avise, que ce qu'on cherche à traduire est le tout bête : « Deus ex solis suae naturae legibus, & a nemine coactus agit » (« Dieu n'agit que selon les lois de Sa nature, sans que personne ne L'y contraigne ») - mesquin, laid et juste - et m'éclate de honte et de rire… Ce rire tourne au jaune, lorsqu'ils nous apprennent, que le spinozisme est la lumière de la vérité, qui mène de l'angoisse d'une fausse vie à la joie des hommes libres… Un rat de bibliothèques - en sauveur des aigles, des chouettes ou des rossignols !
action,angoisse,beauté,consolation,contrainte,grandeur,honte,justice,liberté,nature,…

mot
Le sort comique du mot absolu, dans la philosophie européenne (ein Kabinettstück für Philosophieprofessoren - Schopenhauer). Pauvre Dieu spinoziste, enseveli sous une double couche d’absurdités – substance absolue. Pauvre savoir absolu Kant, réduit à ce qui est inconditionnel (inexistant dans la représentation, ce seul support de tout savoir), au savoir apriorique, dont la formule 5 + 7 = 12 exprime la quintessence. C’est de la misère, mais avec Hegel ce sera de l’indigence.
concept,être,europe,intelligence,représentation,savoir

mot
Une proposition en langue naturelle est définie par cinq éléments : l’émetteur-récepteur (sujets de représentation et d’interprétation), la formule logique sous-jacente (connecteurs, négations, quantificateurs), les mots auxiliaires (typologie de phrases, modalités, degrés de certitude), la mémoire du contexte (acteurs, objets courants), les références d’objets (formulées par l’émetteur, interprétées par le récepteur). La proposition est une idée langagière, et le monde des idées est, évidemment, infiniment plus riche que le monde des objets. Pour ce lourdaud de Spinoza, ils sont équivalents.
concept,doute,idée,interprétation,langue,mémoire,négation,représentation,science

mot
La virgule - « Dieu, ou la Nature » (au lieu de « Deus Naturaque » - G.Bruno ou « Deus sive Natura » - Spinoza) – permettrait de distinguer la disjonction d'identité de la disjonction d'alternative - « la raison ou la conscience » (« ratio vel conscientia » - Thomas d'Aquin). Malheureusement, Thomas d'Aquin visait plutôt « la raison, ou la conscience », puisqu'il ignorait la conscience morale.
bien,conscience,dieu,langue,nature,raison

mot
Les termes de géométrie ou de psychologie, auraient pu nous renvoyer à l’invention d’unités de mesure ou à l’écoute de l’âme – deux nobles activités. Mais si Spinoza ignore tout de cette lecture, Nietzsche l’accepte et l’applique.
âme,balance,concept,interprétation,noblesse,ouïe,science

mot
En matière des niaiseries à nier, les assertions sont beaucoup plus vulnérables et instructives que les concepts. Tout Spinoza, tout Hegel, peuvent être ridiculisés de cette manière. La plupart des moralistes aussi. La possibilité, qui me manque, de réfuter que Dieu est, me cache son inexistence, est-ce plus absurde et bête que « L’impossibilité où je suis de prouver que Dieu n’est pas me découvre son existence » - La Bruyère ?
être,idée,intelligence,négation

noblesse
Au centre des soucis du poète et du philosophe se trouve la métaphore, mais à leurs frontières, ils se divergent. Le poète y est attiré par le noble et le philosophe - par le sacré. Le second doit donc être un prêtre et le premier - un prince. Appeler prince des philosophes Spinoza (Deleuze), le moins poétique de tous les philosophes, est une aberration.
métaphore,philosophie,poésie,sacré

noblesse
Dans les profondeurs, il n'y a que très peu de points d'attache ; et en surface ils abondent. D'où l'austérité des profonds et l'exubérance des superficiels. Mais la personnalité n'a qu'une seule dimension probante - la hauteur, et elle accompagne plus naturellement les superficiels que les profonds, elle est plus près de la caresse que du forage. Et J.Benda : « En ce qui regarde l'amour, Descartes, Spinoza, H.Spencer travaillent en profondeur et Stendhal - presque uniquement en surface » - n'y est pas si idiot qu'il en a l'air. La peau n'est peut-être pas ce qu'il y a de plus profond chez nous (Valéry), mais elle promet une belle hauteur.
amour,axe,caresse,hauteur,voix

noblesse
L'âme a sa place jusque dans l'harmonie géométrique (comme la raison est toujours bien venue dans le chaos sentimental), mais la gent professoresque continue à encenser ces deux sinistres personnages, Descartes et Spinoza, pour avoir substitué partout anima par mens.
âme,école,raison,romantisme

noblesse
L'émotion et l'intelligence sont d'immenses problèmes, que nous dicte le mystère de l'âme et de l'esprit, ces derniers n'étant, peut-être, que deux émanations ou deux langages de ce qu'ils appellent être ; l'être ne serait envisageable qu'à travers l'âme ou l'esprit, qui en seraient des trous (Hegel et Sartre) ou des plis (Spinoza et Heidegger), et que j'appellerais, dans la même veine érotique, - des excitants ou des excités.
âme,caresse,esprit,être,mystère,philosophie

noblesse
On traverse les passions, les souffrances, les illuminations ; on adresse à leur source, à son soi inconnu, les vœux de reconnaissance et de vénération ; on comprend que le sens de l'existence est d'entretenir cette soif profonde et cette haute musique. Et l'on tombe sur les crétins, pour qui « la fin suprême de l'homme : connaître d'une manière adéquate et soi-même, et toutes les choses » - Spinoza - « finis ultimus : se resque omnes adæquate concipiendum ». De ces crétins est né le robot moderne, ignorant et la soif et la musique.
amour,hauteur,hommes,inconnu,intelligence,modernité,musique,robot,savoir,soi,…

noblesse
Une bonne philosophie : la noblesse des questions, l'ironie du raisonnement, la fierté ou/et l'humilité des réponses. Le spinozisme : l'inertie des questions, la fausseté du raisonnement, la mécanique arbitraire des réponses. La phénoménologie : la logorrhée des réponses, l'apparence de raisonnement, l'insignifiance des questions.
acquiescement,continuité,grandeur,philosophie,question,robot

noblesse
Je suis indifférent à Platon, à Spinoza, à Kant ; mais je ne puis pas en être ennemi ; combattre la grisaille, c'est profaner mes propres couleurs. Mais il faut que je sache me dresser en ennemi de St-Augustin, de Voltaire, de Nietzsche, pour mettre à l'épreuve mes palettes.
auteur,ironie,lutte

noblesse
Le goujat veut que rien ne dépende de nos espérances (Spinoza) ; pour les habitués de la bassesse, c’est normal, puisque la seule chose qui en dépende vraiment, c’est la hauteur de nos élans.
bassesse,élan,force,espérance,hauteur

noblesse
L’artiste doit et peut mettre l’esthétique au-dessus de l’éthique (Nietzsche et son dédain de la pitié) ; le goujat veut et sait faire l’inverse (Spinoza s’acharnant contre la tristesse, ou Hegel dénonçant les belles âmes).
art,bassesse,beauté,bien,mélancolie,pitié,sentiment

st augustin
Aspectus animae, ratio est.

Le regard de l'âme, c'est la raison.
noblesse
Je dirais plutôt, que la raison de l'âme, c'est le regard. La raison est ce qui produit les évidences calculatrices, le regard - ce qui est produit par l'intuition créatrice. La raison est produite par le cerveau (qui n'est que les yeux et non pas le regard), et Spinoza l'a bien vu : « Les yeux de l'âme, ce sont les démonstrations » - « Mentis enim oculi sunt ipsae demonstrationes ». Le regard de l'âme, ce sont nos apories vitales.
âme,création,paradoxe,raison,regard

spinoza b.
Maxima superbia vel abiectio est maxima sui ignorantia.

L'orgueil et l'humilité extrêmes sont signes de la méconnaissance extrême de soi-même.
noblesse
Tandis que ceux qui se connaissent ont la sensibilité des circuits intégrés, qu'ils finiront un jour par devenir, jusqu'à l'advenue du premier robot humble et orgueilleux, du premier génie mécanique dans le domaine de l'esprit. La passion et l'orgueil, c'est tout connaître, sauf soi-même.
acquiescement,esprit,gloire,robot,savoir,soi

proximité
Peut-être le Dieu-analyste ne créa que le temps, l'espace ayant été préalablement créé par le Dieu-géomètre. Celui-ci créa le vrai, et Celui-là - le bon et le beau. Ils laisseraient l'homme divaguer sur les commencements et les fins, tandis que Eux-mêmes ne créeraient que l'algorithme, s'appliquant aux atomes et aux esprits. C'est à Eux que pensait Spinoza : « Dieu, pour agir, n'a ni commencements ni fins » - « Deus agendi principium, vel finem, habet nullum ».
action,beauté,bien,commencement,dieu,temps,vérité

proximité
Personne, ni le scientifique, ni le philosophe, ni le théologien, n'est plus près de Dieu que le poète. Ce que St-Augustin, Spinoza, Kant, les prix Nobel ou Fields développent autour de l'essence divine est d'un ridicule accompli et lamentable, tandis que l'intelligence divine est enveloppée par tout bel élan poétique, gratuit, incompréhensible et noble.
art,discursif,dieu,élan,esprit,intelligence,noblesse,philosophie,poésie

proximité
Ce qui ne laisse pas de traces ne peut pas avoir d'attributs ; ni le comparatif ni le superlatif n'y ont de place ; l'omniscient avec l'infinité d'attributs (Spinoza) ou le meilleur que mon âme (Pascal) ne qualifient que le néant.
concept,dieu,être,inconnu

proximité
Face à l'idée de sa propre mort, tout homme lucide, non berné ni bercé par une minable superstition, devrait passer sa vie à hurler sur la lune, les cheveux dressés, le cerveau en feu, les yeux fixés sur son tombeau. Pourtant, il se comporte, comme si une immortalité l'attendait au bout du chemin ; le Créateur mit en lui un irrésistible et bel instinct. « Nous ressentons, au fond de nous-mêmes, notre éternité » - Spinoza - « Sentimus experimurque nos aeternos esse ». Et ils continuent à se croire au théâtre : « Mon âme, il faut partir » - les dernières paroles de Descartes, de celui qui, pourtant, disait : « Il est certain, que mon âme peut exister sans mon corps ! ».
âme,création,dieu,éternité,mort,vie

proximité
Le Dieu de Spinoza, à l'infinité d'attributs, est aussi loufoque que le Dieu s'incarnant dans un fils de charpentier ou s'identifiant avec un marchand de tapis. Le Dieu inconnu, le seul, qui mérite nos louanges, est celui qui, premièrement, déposa en nous les germes du vrai, du bon et du beau et, deuxièmement, pour les percevoir, nous munit d'un cerveau, d'un cœur et d'une âme. « Dieu se connaît mieux en restant inconnu »** - St-Augustin - « Deus scitur melius nesciendo ».
âme,beauté,bien,christianisme,cœur,concept,dieu,raison,vérité

proximité
Le même ennui émane des dieux de Descartes, de Leibniz, de Spinoza ; c'est comme si l'on raisonnait sur les triangles les plus libres, ou les plus parfaits, ou les plus nécessaires.
dieu,ironie,liberté,nécessité

proximité
La définition spinoziste de Dieu, ens absolute infinitum, paraît être moins absurde, si l'on la lit à la lumière des contraintes et des fins, en voyant dans absolute - détachement ou liberté (par étymologie), et dans infinitum - absence de fins (par abus de négation).
absurde,contrainte,dieu,inconnu,liberté,mot,négation

proximité
Quand j'entends que Dieu est un être suprêmement intelligent (Descartes) ou un étant absolument infini (Spinoza), je suis tenté de trahir mon goût du superlatif, pour m'accrocher au positif, à portée d'un cœur naïf et d'un esprit humble.
acquiescement,auteur,cœur,dieu,esprit,inconnu,intelligence,simplicité

proximité
La nature est divine, mais Dieu n'est certainement pas naturel - telle peut être la réplique à nos contemporains, pour qui le monde n'est ni divin ni naturel, mais exclusivement - mécanique ; ce qui, à son tour, est à l'opposé de deus sive natura (Spinoza – l'Horloger confondu avec Son horloge) et de aut deus aut natura (Feuerbach – aime l'horloge ou l'Horloger). Jadis, le poète discourait sur les merveilles de la nature, et l'on aboutissait tout naturellement à Dieu ; aujourd'hui, le robot discourt de Dieu comme s'il s'agissait des faits de la nature.
dieu,hommes,nature,poésie,robot

proximité
On se rapproche par l'intérêt qu'on porte aux mêmes objets ; on se fraternise par l'intensité et la noblesse de relations entre objets. Nietzsche tombe sur la volonté et la puissance, chez Schopenhauer et Spinoza, mais la volonté du premier se forge dans le ressentiment (et non pas dans l'acquiescement nietzschéen), et la puissance du second s'attache à un esprit du savoir (et non pas sur l'âme du valoir nietzschéen). Et Nietzsche finit par se détacher de ses faux ancêtres (comme Valéry – de Descartes, avec sa méthode).
âme,concept,esprit,fraternité,intensité,négation,noblesse,savoir,valoir

proximité
La volonté de puissance est une pulsion que n’éprouvent que les scientifiques et les artistes, puisque leur regard est tourné vers l’absolu, vers ce Dieu, Créateur de notre esprit curieux et de notre âme inapaisée ; la volonté divine sous-jacente serait l’asile de leur créativité, tandis que chez les autres, « la volonté de Dieu est l’asile de l’ignorance » - Spinoza - « Dei voluntatem, hoc est, ignorantiae asylum ».
âme,angoisse,art,création,dieu,esprit,force,hommes,savoir,science,…

proximité
Dire que Dieu est la Nature (Spinoza) est aussi idiot, que dire que l’horloger est l’horloge. Dieu créa cette nature merveilleuse, couronnée par la vie ; Dieu mit dans l’homme trois sublimes facultés – le cœur, l’âme, l’esprit ; mais si le Bien reste une étincelle divine, réchauffant notre cœur mais intraduisible en actes, la Beauté et la Vérité (l’art et la science) sont des œuvres entièrement humaines. L’art est affaire de sensibilité et de génie ; la science est affaire de représentation et de langage. Dieu, apparemment, n’a pas besoin de ces attributs ; par ailleurs, tous les attributs, qu’on lui prête, sont anthropomorphes ; Dieu n’est pas seulement muet, mais nu et peut-être inexistant.
absurde,action,âme,art,beauté,bien,cœur,dieu,esprit,hommes,…

proximité
La divinité du Créateur, la divinité du créé – natura naturans, natura naturata – nous n’avons aucune idée du premier, le bavardage spinoziste sur la substance ou les attributs de Dieu est totalement ridicule ; il ne nous reste que l’admiration, la vénération, le culte, la foi – face à la mystérieuse harmonie de la matière et de l’esprit créés.
création,dieu,esprit,être,inconnu,matière,mystère

proximité
Le dieu de Spinoza (que celui-ci, imperturbable, ne vénère même pas) est aussi loufoque que celui qui serait descendu, un jour, sur Terre, pour être entouré, ensuite, d’une vénération absurde et sincère. Le Dieu est dans le miracle réel de l’Univers et non pas dans la pseudo-logique ou dans la foi fanatique, toutes les deux imaginaires.
dieu,mensonge,mystère,nature,réalité,sacré,science

spinoza b.
Deus sit ens absolute infinitum infinitis attributis.

Dieu est l'infinité d'attributs infinis.
proximité
Pourquoi pas « l'absence de tout attribut » ? C'est par de telles définitions liminaires que les sages de profession se mettent à déverser leurs balivernes géométriques sur leur Dieu à attributs. Un principe obscur, sur lequel ils bâtissent d'ennuyeuses et intenables clartés. Le sage d'intuition débute par un principe clair d'où fusent d'obscures et belles hypothèses.
concept,discursif,doute,école,inconnu,platitude,représentation

spinoza b.
Quo magis res singulares intelligimus eo magis Deum intelligimus.

Plus nous comprenons les choses singulières, plus nous comprenons Dieu.
proximité
Même la singularité s'inscrit dans quelque généralité divine. Toute création est manipulation de classes, et Dieu n'y échappe pas.
chemin,création,dieu,ordre,représentation

valéry p.
Rien n'est qui ne se puisse voir d'un peu plus près ou s'exprimer avec un peu plus de signes et de variables.
proximité
Le tout est de savoir interpréter les substitutions des anciennes variables et d'imposer le respect des nouveaux signes (« le parfait impose l'inachèvement »***). La réalité, d'après cette naïve et géniale définition (surclassant l'immanence, asiatique ou spinoziste, et la docte falsifiabilité de Popper) et contrairement aux représentations, est tout bonnement la perfection. « L'être a toujours des réserves » - Heidegger - « Sein ist immer vorrätig ». En revanche, on épuise vite toutes les variables, en modélisant les centaures ou les licornes.
arbre,asie,être,interprétation,réalité,représentation,simplicité

russie
Entouré d'hommes extraordinaires, en Russie, on finit par presque oublier la société abominable, dans laquelle on est immergé. « Une société, dont la paix ne dépend que de l'inertie des sujets, mérite le nom de tribu plutôt que de société » - Spinoza - « Civitas, cujus pax a subditorum inertia pendet, rectius solitudo, quam Civitas dici potest ». Admiratif devant une société extraordinaire, en Europe, je finis par ne plus m'intéresser à ses hommes abominables.
auteur,continuité,europe,hommes,liberté

solitude
Mon visage, c'est mon soi inconnu, le créateur ; mon soi connu, le producteur, ne ne peut exhiber que des masques. Les masques, que grime l'homme de la multitude, sont reproductions des visions communes, tandis que le regard du solitaire invente ces masques, est obligé de les inventer. Même chez les meilleurs, la mascarade peut devenir fanfaronnade. Ce que Nietzsche dit de Spinoza : « O combien de sa propre vulnérabilité trahit cette mascarade d'un malade solitaire ! » - « Wie viel eigne Angreifbarkeit verräth diese Maskerade eines einsiedlerischen Kranken ! » - s'applique parfaitement à lui-même.
création,force,inconnu,mouton,regard,soi,voix

solitude
Des hordes de professeurs stériles imitent les méthodes cartésienne, spinoziste, hégélienne, husserlienne ; personne n’est capable d’imiter Héraclite, Pascal ou Nietzsche. La solitude des grands s’étend aussi bien dans l’espace que dans le temps ; un bon philosophe est fatalement et doublement solitaire.
école,grandeur,mouton,philosophie,temps

spinoza b.
Homo magis in civitate ubi ex communi decreto vivit quam in solitudine ubi sibi soli obtemperat, liber est.

L'homme est plus libre dans la Cité, où il vit d'après les lois communes, que dans la solitude, où il n'obéit qu'à lui-même.
solitude
Oui, la solitude, c'est de l'esclavage ; mais comme la liberté, qui peut être créatrice ou robotique, l'esclavage, lui aussi, peut se vivre dans la profondeur des contraintes horrifiantes ou dans la hauteur des passions vivifiantes. Il n'existent pas de passions libres.
cité,contrainte,hauteur,liberté,sentiment

souffrance
Réduire toute la vie à l'horreur, chose presque spontanée, pour une sensibilité doublée d'une intelligence. Et le mot de Spinoza : « L'homme libre ne pense à rien moins qu'à la mort » - « Homo liber de nulla re minus quam de morte cogitat » - ne présente pas une sérénité de sage, mais une martingale d'angoissé. Songer à la manière d’être dépêché dans l’au-delà d'Eschyle, dont la calvitie reçut une tortue lâchée par un aigle myope, à la recherche d'une pierre, ou de Barthes, fauché par une camionnette.
âme,angoisse,esprit,intelligence,ironie,liberté,mort,sentiment,vie

souffrance
La vie est brève et fluide, la mort est éternelle et constante. L'arbre de vie, qui perdrait toutes ses variables, rejoindrait le royaume de la mort. Il faut être spinoziste, c'est à dire un sot, pour croire, que « notre Béatitude ou notre Liberté consiste dans l'Amour constant et éternel » - « nostra beatitudo seu libertas consistit in constanti et æterno erga Deum amore »
amour,arbre,bonheur,éternité,intelligence,liberté,mort,vie

souffrance
Spinoza et Leibniz se rangent du côté du bonheur et de la joie, Schopenhauer et Kierkegaard – du côté de la souffrance et du désespoir, Heidegger et Cioran – du côté de l’ennui et de l’extase, mais seul Nietzsche parvient à joindre ces deux bouts, que couronne l'intensité de la vie et de l'art, l'éthique cédant place à l'esthétique. Le fond de la vie est bien animé par le bien, mais c'est le beau qui en crée la forme - l'art.
art,axe,beauté,bien,bonheur,élan,ennui,espérance,intensité,style,…

souffrance
Les causes de notre désespoir sont évidentes, fatales, banales, communes, nullement aléatoires ; il faut être niais pour trouver dans leur connaissance une grande joie (Spinoza). Étant, toutes, horizontales, elles pourraient, à la limite, mieux nous orienter vers la verticalité de nos espérances.
espérance,hauteur,intelligence,savoir

souffrance
C’est bien le désespoir qui est signe de l’impuissance de l’âme (l’obtus Spinoza voyait dans celle-ci l’origine de l’impossible et condamnable espérance) ; l’âme dont le premier souci devrait se consacrer à la peinture d’une belle espérance atemporelle, irréfutable bien qu’impossible.
absurde,âme,espérance,force,temps

souffrance
Épicure, Lucrèce, Sénèque, Boèce portent le sens tragique de la vie et, donc, se penchent sur la consolation. Chez les modernes, on ne trouve le besoin de consoler que chez Tchékhov. Le doute trivial de Descartes, le désespoir géométrique de Spinoza, l’absolu galimatieux de Hegel occupent, aujourd’hui, les esprits privés d’âme.
âme,consolation,doute,esprit,modernité,tragédie,vie

souffrance
Seuls les plus obtus des philosophes, les spinozistes, promettent de la joie, qui consisterait en connaissances. Dans l'insipide jungle moderne, l'Ecclésiaste bureautisé déracina toute libido sciendi, toujours solitaire, tandis que le nom même d'Ecclésiaste désigne celui qui prêche à la foule. On a beau placer son Golgotha au milieu du jardin d'Éden, - la croix ou le pommier - c'est la rencontre des crânes et le divorce des désirs. Dans l'arbre du rêve, le savoir est ce qui en soude les branches ; la douleur - ce qui amène la sève et colorie les fleurs. Tout ce qui n'est pas tenté par la hauteur d'arbre est teinté de platitude.
arbre,bonheur,espérance,hauteur,mouton,platitude,réalité,rêve,savoir

spinoza b.
Titillationem et dolorem ad hominem referri quando una ejus pars est affecta ; hilaritatem et melancholiam quando omnes pariter sunt affectæ.

Caresse et souffrance se présentent, quand l'homme n'en est affecté que dans une seule partie ; rire ou tristesse - quand tout en lui en est touché.
souffrance
C'est comme l'aphorisme, comparé avec le roman : la caresse est la maxime du bonheur ; tout dire est dire l'ennui ; la peau est cette délicieuse partie, où la hauteur du regard rencontre la profondeur du désir.
bonheur,caresse,ennui,hauteur,maxime,regard

spinoza b.
Abiectio est de se præ tristitia minus justo sentire.

L'humilité consiste à te voir, en proie à la tristesse, moins grand que tu n'es.
souffrance
C'est pourquoi, parmi les orgueilleux et transparents comptables, les plus répandus de tes admirateurs, on ne voit pas beaucoup d'humbles. Le soi visible peut être profond, mais l'humilité consiste à reconnaître, qu'il ne sera jamais aussi haut que le soi inconnu. Ou bien qu'en matières profondes nous sommes tous interchangeables ; la fierté n'y a pas sa place.
acquiescement,grandeur,hauteur,inconnu,mélancolie,mouton,soi

vérité
Spinoza : un délirant se donnant l'air savant ; Heidegger : un savant cherchant l'air délirant. Le premier prétend, naïvement, prouver des vérités éternelles ; le second, lucide, invente sa propre notion de vérité, valable dans une seule maison de l'être, son langage. Le sérieux d'un jargon mal maîtrisé ou les jeux d'un langage à créer.
création,doute,éternité,être,langue,savoir,science,simplicité

vérité
Cette permanente bêtise de la gent philosophale, qui voit dans l'erreur le contraire de la vérité (surtout selon la tradition spinoziste), tandis que le seul sens acceptable de ce contraire serait incapacité de prouver, dont l'erreur n'est qu'un infime cas particulier.
erreur,interprétation,négation

vérité
Intuitivement, on répartit la vérité entre trois sphères : la réalité, le langage, la représentation. Le superficiel privilégie la première, le technicien - la deuxième, le profond - la troisième. « Le vrai et le faux sont des attributs du langage, non des choses. Et là où il n'y a pas de langage, il n'y a ni vérité ni fausseté »*** - Hobbes - « ‘True' and ‘false' are attributes of speech, not of things. And where speech is not, there is neither ‘truth' nor ‘falsehood' » - il faudrait l'expliquer à Thomas d'Aquin, Descartes, Spinoza, Kant, Bergson, pour qui la vérité est une conformité avec les choses (confusion entre vérité et validité). Mais, campées dans le langage lui-même, les vérités sont stériles. On leur apporte de la vie, en insérant entre le langage et les choses - un modèle de référence, modèle de l'univers, qui n'est ni langagier ni réel.
concept,création,langue,réalité,représentation,vie

vérité
La vérité en tant qu'adéquation (Spinoza) ou en tant que dévoilement de l'être (Heidegger), ce sont deux abus de langage, puisque l'adéquation s'établit après la démonstration de la vérité (au sein d'un langage et à partir des requêtes) et le dévoilement n'est qu'un passage vers la représentation, avant toute requête (sans requêtes et sans leurs preuves – point de vérités).
erreur,être,langue,question,représentation

vérité
Sans le don poétique, tourner autour de la vérité, comme autour d'une machine à vapeur ou du Code de la route, est condamné à l'ennui et à la routine. Aristote, Spinoza, Kant, Hegel – tout ce qu'ils exposent, lourdement, sur la vérité, et que leurs acolytes remâchent infiniment, ne présente plus aucun intérêt et doit être oublié. Nietzsche et Valéry, deux poètes, si éloignés du clan professoresque, émettent la-dessus des avis autrement plus rafraîchissants. Quant aux avis en marbre, c'est auprès des logiciens et des linguistes, comme Chomsky, qu'il faut les chercher.
école,ennui,langue,mémoire,poésie,science

vérité
Trois types de négation : la syntaxique (portant sur une proposition), la sémantique (portant sur une relation ou un attribut), l'exclusive (la négation-contrainte, spécifiant les angles de vue à exclure). C'est la dernière qui est visée par Spinoza dans sa définition de determinatio negatio est.
concept,contrainte,négation,représentation

vérité
Ce qui décide du vrai ou du faux, ce sont les outils – la logique, la poésie, l’éthique. De même, pour voir la lumière ou les ténèbres, on fait appel aux outils – aux yeux, à l’imagination, à l’âme. Les mal outillés se contentent de platitudes ampoulées et insensées : « Comme la lumière se montre et montre les ténèbres, la vérité se détermine et détermine la fausseté » - Spinoza - « Sicut lux se ipsam et tenebras manifestat, sic veritas norma sui et falsi est ».
âme,bien,ombre,platitude,poésie,science

vérité
Pour porter aux nues Spinoza et Hegel, il faut être : ignare en logique, obsédé par le mot savoir, insensible au style, entraîné vers le bavardage ou la graphomanie. Pour aimer Nietzsche et Valéry, il faut tenir à la noblesse, à l’intelligence, à la poésie. Poursuite, hors langage, des occultes vérités pseudo-universelles ; ou création de langages, pour exprimer des vérités lumineuses individuelles.
création,intelligence,langue,noblesse,poésie,savoir,science,style,universel,voix

vérité
Les logorrhées spinozistes, hégéliennes, phénoménologiques, proférées pourtant par des personnages érudits, s’expliquent par le non-usage de la contrainte la plus importante qu’aurait dû appliquer tout auteur de discours intellectuels – avant de retenir une assertion, la confronter à ses contraires. S’il se trouve un couple d’opposés, admettant des justifications intellectuelles ou esthétiques comparables, - biffer l’assertion, elle est due au hasard, au caprice, à l’arbitraire ; c’est l’antithèse du bon goût.
axe,beauté,contrainte,goût,interprétation,jeu,négation,philosophie,savoir,science

spinoza b.
Omnis determinatio negatio est.

Toute définition est négation.
vérité
Syntaxiquement, c'est faux ; une définition est un filtre muni d'un mode de son emploi permettant le constat de succès ou d'échec ; une des négations sémantiques, la moins constructive, mais donnant de la rigueur à la résignation, est la négation par échec. En logique comme dans la vie, la négation n'est bonne qu'auréolée d'une défaite. Les définitions apophatiques sont nulles. Il vaut mieux compter sur les contraintes – les antonymes.
acquiescement,contrainte,défaite,filtre,langue,négation,raison
Spinoza B.