| amour | | | On dirait que la phobie du serpent, l'inclination devant la rose, la répugnance devant le mensonge sont des reliques de nos sentiments métaphysiques nés du bon (la chute), du beau (la perfection), du vrai (l'harmonie avec le monde). En dehors de ces trois branches, je ne connais qu'un seul sentiment, résistant à toute tentative de notre volonté ou de notre réflexion de nous en débarrasser, c'est l'amour. « Le cÅ“ur peut, à son gré, accueillir l'amour, mais non s'en défaire » - Publilius - « Amor animi arbitrio sumitur, non ponitur ». | | | | |
|
| amour | | | Une aberration du français (comme de l'anglais et de l'allemand) : savoir signifiant tantôt maîtriser et tantôt ne pas ignorer - quand on sait aimer, on n'aime pas, puisque aimer, c'est ne pas savoir. « Si tu aimes, tu ne sais plus ; et si tu sais, tu n'aimes plus »** - Publilius - « Cum ames non sapias, aut cum sapias, non ames ». D'autres exemples, chez Pascal : le cÅ“ur et ses raisons, que la raison ignore, ou, chez Sartre : des tenants du monde sans conscience ou des fanatiques de la conscience sans monde… Il n'y a pas de contradiction entre être artiste de son amour et avoir une tête sans droit au chapitre. | | | | |
|
| publilius s. | | | Animo imperato ne tibi animus imperet.
Domine tes passions, pour qu'elles ne te dominent pas. | | | | |
| | amour | | | Plus les passions me déséquilibrent, plus l'harmonie y trouve d'échos. Plus je domine les passions fécondes, plus je m'aperçois de l'incurie inféconde du reste. | | | | |
|
|
| thomas d'aquin | | | Nullus potest amare aliquid incognitum.
Rien ne peut être aimé inconnu. | | | | |
| | amour | | | De Vinci partage la même platitude : « On ne peut ni aimer ni haïr que ce qu'on connaît » - « nessuna cosa si può amare o odiare se prima non si ha cognizione di essa »Â ; c'est Publilius qui tient le bon bout : « L'amoureux ne connaît que son désir, il ne voit pas ce qu'il possède »** - « Amans quid cupiat scit, quid sapiat non vidit ». | | | | |
|
|
| bien | | | L'explication de la paix d'âme du salaud d'aujourd'hui : contrairement aux époques précédentes, il ne voit plus les bleus, plaies et bosses de ses victimes. Le bâton pesait sur la conscience beaucoup plus que le papier et les cartes de crédit. « La conscience tranquille nuit à la santé de l'âme »* (Euripide) et finit par l'étouffer. Et sans l'âme, c'est à dire sans conscience, ils vivent en torpeur, sans connaître la honte : « Les blessures de la conscience ne se cicatrisent jamais » - Publilius - « Cicatrix conscientiae pro vulnere est ». | | | | |
|
| bien | | | Le langage du Bien, c'est la fatalité du banc des accusés, où tout innocent doit se morfondre. « L'accusé innocent craint la Fortune et non pas les témoins » - Publilius - « Reus innocens fortunam, non testem timet ». Je n'ai pas besoin de témoins, pour découvrir mes fautes. Que je dois à la Fortune. | | | | |
|
| bien | | | Combattre ou tolérer le mal – multiplier le mal qui me ronge ou multiplier le mal qui ronge les autres – face au mal réel, sauver le corps des autres ou condamner ma propre âme à de nouveaux remords. Le Bien est mystérieux, et le défi problématique du mal est sans solution ; le Bien divin n'est bien que sans énergie. « Pitié pour le mauvais, pour sauver le bon »* - Publilius - « Honeste parcas improbo, ut parcas probo ». | | | | |
|
| ironie | | | La chute la plus profonde attend l'arbre le plus haut. Il t'aura donné le vertige de ses jeunes saisons, il t'en donne un autre, l'ultime, auprès de ses racines, ses ruines, - « la chute de l'humble n'est pas profonde »** - Publilius - « Humilis nec alte cadere potest » - il faut chercher des chutes vers le ciel, que te promettent l'humilité et la honte. | | | | |
|
| mot | | | Le langage n'a rien de réfléchissant ou d'illuminant ; il est aberrant de dire, que « le langage est le miroir du monde ; et la réalité est l'ombre portée de la grammaire » - Wittgenstein - « Die Sprache ist der Spiegel der Welt ; und die Realität ist der Schatten der Grammatik » (« miroir de l'esprit » - Leibniz, « miroir de l'âme » - Publilius) - plus qu'avec la réalité, le langage communique avec la représentation et la reflète. Cette image, spéculaire du réel, est l'une des introductions rampantes du robot. Le minable tournant analytique (Frege), aplatissant l'élégant tournant cognitif (Chomsky). | | | | |
|
| noblesse | | | Dans la hauteur, les victoires et les défaites se valent et doivent servir de matière à notre fond tragique ; dans la profondeur, il vaut mieux réduire les deux à leur future forme comique. La hauteur est habitée par notre soi inconnu ; la profondeur est la demeure de notre soi connu, il s'agit de ne pas le laisser s'abattre dans la défaite ni s'enivrer dans la victoire : « Qui triomphe de soi dans la victoire triomphe doublement » - Publilius - « Bis vincit qui se vincit in victoria ». | | | | |
|
| camus a. | | | Se déclarer innocent, hardiesse toujours impossible à l'homme seul. | | | | |
| | solitude | | | Et c'est la définition même du troupeau : une vaste et bêlante innocence émanant d'une rumination, sereine, cadencée et franche. Et Publilius n'y comprit rien : « Si tu veux vivre en innocent, tu vas tout droit vers la solitude » - « Solitudinem quaerat, qui vult cum innocentibus vivere » - c'est sur le banc des accusés, bricolé par ma conscience, que je l'acquiers plus sûrement. | | | | |
|
|
| vérité | | | La vérité est l’un de ces thèmes creux, favorisant un langage ampoulé mais dépersonnalisé. Le premier geste des chercheurs de vérités d'esclave est d’adopter une langue de bois commune, académique ou populacière. Il ne sert à rien de les encourager : « Quand tu as soif de vérité, laisse éclater ta langue » - Publilius - « Licentiam des linguae, cum verum petas » - puisque, ayant toute honte bue, ils sont sans soif. | | | | |
|