| action | | | Tous les salopards nous renvoient aux candides motifs, pour justifier leurs sales actions. « Le motif seul fait le mérite des actions des hommes, et le désintéressement y met la perfection » - La Bruyère. Avec le plus droit des motifs, l'action sera toujours courbe ; n'écoute pas Sénèque : « L'action ne fut guère droite, si le motif ne l'a pas été » - « Actio recta non erit, nisi recta fuerit voluntas ». Les prônes sont pires que les actions ! « La récompense de l'acte dépend de ses intentions » - le Coran. L'action n'a pas d'intérieur, qui aurait pu la sauver, toute sa fécondité est à l'extérieur. L'action est trop franchement naturelle et le motif (et même le quiétif de Schopenhauer) est trop hypocritement artificiel. | | | | |
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| action | | | Le choix bien pesé d'inactions témoigne mieux du degré de ma liberté que le choix de mes actions. Surtout en absence d'autres mesureurs ; « Être libre, c'est être le seul arbitre de ce qu'on fait et de ce qu'on ne fait point »** - La Bruyère. | | | | |
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| action | | | Si on connaît les raisons de ses actes, on ne peut pas les proclamer libres. « Il y a un sentiment de liberté à suivre ses caprices, et de servitude – à courir pour son établissement »*** - La Bruyère. | | | | |
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| art | | | Un don musical ou pictural est le seul à pouvoir pallier à l'incapacité de formuler de bonnes définitions. « Tout l'esprit d'un auteur consiste à bien définir et à bien peindre »* - La Bruyère - le et devrait y être substitué par le ou. Nietzsche et Valéry sont les seuls à réunir ces deux talents. | | | | |
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| bien | | | Comme la poésie nous soulève par son inspiration de l'inexprimable, le Bien nous touche par la conscience de sa propre impossibilité, ou plutôt de celle d'émaner de nous-mêmes : « le Bien réel ne peut venir que du dehors, jamais de notre effort » - S.Weil. Nous ne pouvons irradier que la pitié : « La pitié est un retour vers nous-mêmes »** - La Bruyère. | | | | |
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| doute | | | L'incertitude idéale serait à la fois grande et faible : « Quelle plus grande faiblesse que d'être incertains, quel est le principe de son être et quelle en doit être la fin ? »** - La Bruyère. Seuls les esprits les plus forts peuvent se permettre de cultiver cette noble faiblesse ; les certitudes des faibles, sur ce sujet, relèvent non pas de principes, mais d'une pitoyable doxa. | | | | |
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| hommes | | | Chez tout homme, en cherchant bien, on découvre une âme ; mais lui-même, tourné vers les hommes, ne s'en doute même plus. « La plupart des hommes oublient, qu'ils ont une âme, et se répandent en tant d'actions, où il semble qu'elle est inutile »*** - La Bruyère. | | | | |
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| nietzsche f. | | | Die tiefsten Bücher werden immer etwas von dem aphoristischen Charakter haben.
Les livres les plus profonds garderont toujours quelque chose du genre aphoristique. | | | | |
| | intelligence | | | La profondeur perçue résulte des hauteurs conçues. Et les aphorismes sont des hauteurs, qui, contrairement aux profondeurs, ne se touchent pas – le style interrompu (La Bruyère). « L'homme au souffle immensément long, acceptant la contrainte des propos les plus courts » - Canetti - « Ein Mensch von ungeheuer langem Atem, der sich zu kürzesten Sätzen zwingt ». Ce genre vous oblige à dévoiler votre hauteur ; à une bonne hauteur, viser la profondeur peut dispenser de l'atteindre. « L'aphorisme n'a quoi faire de la vérité, mais il doit la survoler » - K.Kraus - « Ein Aphorismus braucht nicht wahr zu sein, aber er soll die Wahrheit überfliegen ». | | | | |
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| ironie | | | Le bon sens a beau être un bon cuisinier, le bon goût est dicté, Dieu merci, par les commandes des gourmets de nos sens tout court. « Entre le bon sens et le bon goût, il y a la différence de la cause à son effet » - La Bruyère. | | | | |
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| ironie | | | Les esprits chancelants tendent à s'appuyer sur un mur mirifique de la rigueur, tandis que « les esprits justes donnent naturellement dans la métaphore » - La Bruyère. | | | | |
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| proximité | | | Tant d'incantations sur le Dieu-Bonté ou le Dieu-Vérité, c'est à dire sur un inexistant merveilleux ou sur un existant fade, tandis que c'est au Dieu-Beauté qu'un artiste devrait adresser ses prières et ses discours. Parler devant le Bon engendre du faux ; parler devant le Vrai conduit à l'ennui ; il faut parler devant le Beau, ressenti comme Dieu. D'après La Bruyère, Aristote l'aurait compris, en confondant les noms d'Euphraste (beau discours) et de Théophraste (discours divin). | | | | |
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| souffrance | | | Notre âme est plus universelle que notre cÅ“ur, puisqu'elle est sensible aussi bien au comique qu'au tragique, tandis que le cÅ“ur reste inaccessible au comique. La Bruyère : « La vie est une tragédie pour celui qui la sent et une comédie pour celui qui la pense » - est trop tranchant, et son plagiaire : « un homme complet peut porter la tragédie dans son cÅ“ur et la comédie - dans sa tête » - « a sane man can have tragedy in his heart and comedy in his head » - plus prudent et juste. | | | | |
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