| action | | | L'inaction, contrairement à l'action, ne prouve rien (et c'est là son titre de noblesse). Elle indique, par omission, ce à quoi nous refusons le droit de nous exprimer ou de nous représenter. « Ce qui est fait, même un sot est capable de le comprendre »** - Homère. Le vrai artiste comme le vrai scientifique, Homère ou Newton, valent surtout par le mystère de leurs commencements. | | | | |
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| action | | | Parfois, la mer présente des avantages agricoles, par rapport à la terre, puisqu'on peut « labourer la mer sans moisson » - Homère - et laisser toute semence aux messages des bouteilles jetées à la mer, à destination de ceux qui s'intéresseront à ma race plus qu'à ma trace. Je choisirai pour patron Poséidon, fort et profond, seul capable de rendre leur hauteur aux bouteilles coulées. Comme les Stoïciens - avec la force d'Héraclès, les Sceptiques - avec la profondeur d'Hadès. Et je m'acoquinerai avec la nymphe Calypso, celle qui voile, que j'associerai au dévoilement apocalyptique. | | | | |
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| action | | | J'évaluerais l'archer non pas en traces et en grammes, mais en grâce et en flamme ; pour la première gloire, il faut décocher des traits, être Achille, pour la seconde - s'enticher de ses propres traits, être Narcisse. Tenir à la lumière des autres ou être sa propre ombre. « Tire tes flèches, et tu deviendras une lumière pour les hommes » - Homère. Janus du jour, Janus de la nuit – ni tout à fait le même ni tout à fait un autre. | | | | |
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| action | | | Les épopées homériques de déroulent autour de l’agon (compétition) et de la victoire, si chers au jeune Nietzsche, faux guerrier ; mais plus on s’approche de la solitude, plus on s’éloigne de l’olympique compétition publique, qui finit par prendre l’allure d’un combat hésiodique, où tu ne combats qu’un ange, un démon ou un sous-homme, tous imaginaires, - tu es près du Nietzsche mûr. | | | | |
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| amour | | | À une époque, où quelques dysfonctionnements hormonaux sont inscrits dans les codes politiquement corrects, l’imprévoyant Homère : « Rien de plus noble et admirable, qu’un homme et une femme, vivant ensemble » - serait honni par la bien-pensance. | | | | |
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| art | | | Sur l'influence des astres dans la littérature - on distingue nettement quatre types d'écriture : matinale, diurne, vespérale, nocturne. Cultivant l'espoir, la clarté, la chute ou le songe. Naissant de la paresse, de l'action, de la mélancolie ou de l'insomnie. Vivant hors lumière, surgissent des inclassables : Homère, Milton, Joyce, Borgès ; hors mélodie : Beethoven, Goya. | | | | |
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| art | | | Aujourd'hui, Aristote nous expose surtout des évidences, Platon - surtout des banalités, mais Homère est une éternelle découverte et un étonnement sans fin. La philosophie sans poésie va tout droit aux archives. | | | | |
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| art | | | L'ironie d'Apollon : ne pas m'accompagner en toute circonstance, pour voir, à qui je vais me vouer, dès qu'il m'abandonne. « Quelquefois même le bon Homère somnole » - Horace - « Quandoque bonus dormitat Homerus ». D'autres, dès qu'Apollon les quitte, veillent sous la baguette d'Hermès, au lieu de réveiller des Muses ou des Furies. | | | | |
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| art | | | Nous voyons avec nos oreilles ce que Beethoven entendait avec ses yeux. Avoir un regard veut dire remplir les yeux de musique. « J'entendrai des regards, que vous croirez muets » - J.Racine (G.Fauré, avec son Cantique de Jean Racine, rendit audible ce regard funèbre). L'émotion est le dénominateur commun de nos sens. Quand on maîtrise le transfert des numérateurs. Comme Homère : « Ce que lui-même ne voyait pas, il nous le fit voir » - Cicéron - « Que ipse non viderit, nos ut videremus, effecerit ». | | | | |
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| art | | | Je veux traduire mon état d’âme ; celui-ci, certainement, équivaut à une mélodie que, malheureusement, je n’entends pas ; mais je veux qu’un lecteur n’entende qu’une mélodie, qui correspondrait à son propre état d’âme, peut-être très différent du mien. C’est une ambition homérique ou beethovénienne. | | | | |
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| art | | | Ce sont les caprices des dieux, imprévisibles, vengeurs et songeurs, plus que les péripéties touristiques ou martiales des Terriens, qui font le mérite d’Homère ; mais dans l’Orestie d'Eschyle, prolongeant Homère, le venger efface le songer. | | | | |
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| malraux a. | | | La peinture n'est plus pour la foi ou pour la beauté, elle est pour l'individu. | | | | |
| | art | | | Cet individu ne lit ni Homère ni St-Augustin ni Vasari ; il est PDG, golfeur ou spéculateur, à l'offre et la demande robotiques. Et je ne sais plus où le robot est plus présent : dans les yeux de cet individu ou dans le pinceau du gribouilleur. | | | | |
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| bien | | | Pour survivre ou seulement pour pouvoir vivoter sans trop de cauchemars ni remords, le Bien, plus que de cécité, a besoin de paralysie. Le Bien conscient ou agissant est un imposteur. Le Bien est une langue muette : « Le Bien, c'est une langue, qu'entend le sourd et voit l'aveugle »* - Twain - « Kindness is the language which the deaf can hear and the blind can see ». Homère, découvrant le beau, Œdipe découvrant le vrai, en deviennent aveugles. | | | | |
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| cité | | | Les ombres constitueraient un royaume (Homère) ; mais depuis le siècle des Lumières, l'art se veut républicain ; les ombres sont proclamées doubles de la lumière ou, pire, de l'objet ; mais les fantômes royaux décapités continuent à hanter mes pinceaux. | | | | |
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| cité | | | Après les paradis du passé : l'idylle de l'Arcadie (Homère), les règnes de Cronos (Hésiode) ou de Chronos (Platon), vinrent les paradis du futur : les îles Fortunées (Pindare), l'au-delà chrétien (la Bible), l'avenir radieux communiste. Que le romantisme, ce paradis du présent, est plus solide ! Le bonheur, c'est l'élan vers l'inexistant, créé et embelli par moi-même. | | | | |
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| doute | | | À tous les illuminés-prophètes, dont la première lumière tourne irrévocablement en éclairage public, je préfère un enténébré poète, dont les dernières ombres servent de fond à mon étoile. « Je suis fils de la nuit. Ne suis ni prophète ni médecin, mais conducteur des âmes » - Homère. | | | | |
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| doute | | | Deux traitements possibles du bruit que nous recevons du monde : soit nous l'amplifions par nos buts (dans la platitude), soit nous le transformons par la puissance de nos moyens (dans la profondeur du savoir) ou par la noblesse de nos contraintes (dans la hauteur de la musique). Homère : « les dieux savent tout, et nous, nous n'entendons que du bruit » - ne va pas assez loin. | | | | |
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| hommes | | | Résolument moderne - ils pensent que c'est très intelligent, signe de supériorité et de maturité. Hommes d'une saison, d'une seule prise d'images, d'une section plane, hommes des empreintes. L'homme du climat est irrésolument, problématiquement - ou, mieux, mystérieusement - passéiste, car au passé sont toutes les saisons de l'arbre qu'il veut être. « Revenez aux Anciens, et ce sera du progrès » - Verdi - « Tornate all'antico e sarà un progresso » - nos Virgile ne lisent plus Homère et deviennent journalistes. | | | | |
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| hommes | | | Trois belles races se succédèrent – les héros, les poètes, les penseurs – Odysseus avant Homère, Homère avant Héraclite. Et ils disparaissent dans le même ordre (en mode FIFO – first in first out) : le héros appartient déjà au passé ; au présent s'achève l'extinction des poètes ; le penseur, bientôt, les rejoindra dans le néant des cœurs, des âmes et des esprits. Dans ce monde digitalisé, il ne resteront que les robots. | | | | |
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| hommes | | | Le culte de l'arbre naît avec cette découverte, qu'aucune racine ne puisse être naturelle. Le déracinement seul permet de n'être abattu ni par la chute de fleurs ni par la brisure des branchages et de continuer à croire en l'appel désespéré des cimes, à partir desquelles on se met à bâtir un arbre artificiel, au cours d'un dialogue : « J'avais besoin d'un poumon, m'a dit l'arbre : alors, ma sève est devenue feuille. Puis, ma feuille est tombée ; et mon fruit contient toute ma pensée sur la vie »** - Gide. Un autre destin de la feuille : devenir inconnue, pour s'unifier avec d'autres arbres : « Comme est la nature des feuilles, telle est celle des hommes » - Homère. | | | | |
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| hommes | | | La musique disparaît des ouvrages des hommes ; le dernier message d'un art moribond sera écrit par un sourd (tel vieux Beethoven), comme le premier le fut par un aveugle (tel jeune Homère). | | | | |
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| hommes | | | Jamais on n'eut autant de spécialistes professionnels d'Homère, de St-Augustin ou de Léonard qu'aujourd'hui ; mais dans les tableaux que ceux-là peignent de ceux-ci on ne devine plus ni immortels, ni saints, ni génies, mais des ingénieurs ou managers ; et le peintre, lui-même, est statisticien. | | | | |
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| hommes | | | À la pointe de la science, jadis, se trouvaient des poètes, philosophes, mathématiciens, physiciens, biologistes, qui furent, en même temps de véritables encyclopédistes et humanistes, pratiquant la science avec conscience ; quand j'entends l'élite savante de nos jours, les informaticiens, ces misérables robots sans âme, à la réflexion binaire, aux horizons de techniciens des platitudes, je plains leurs ancêtres, d'Homère à Einstein, pour une telle descendance indigne. | | | | |
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| hommes | | | L'utilitaire, au détriment de l'imaginaire, cette dérive peut frapper même les artistes eux-mêmes. Les mêmes sentiments troubles furent à l'origine des boutades platoniciennes contre Homère ou des grognes tolstoïennes contre Shakespeare (Goethe et Nietzsche, deux autres de ses frères, subirent les mêmes foudres – qui aime bien punit bien) : « Une paire de bottes vaut mieux que tout Shakespeare » - Tolstoï - « Пара сапогов ценней всего Шекспира ». Soit on y voit l'ennoblissement du bottier, soit l'un des plausibles ressorts de la plume shakespearienne, la honte. Les besoins des pieds seraient-ils plus vitaux que ceux des narines : « J'ai essayé de lire Shakespeare, et je l'ai trouvé si niais, que j'en ai eu la nausée » - Darwin - « I tried to read Shakespeare, and found it so dull that it nauseated me » - et Wittgenstein fut aussi intraitable, face à l'immoralisme shakespearien. | | | | |
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| hommes | | | On est assez grand, tant qu'on peut se boire ou se lire, en oubliant les lèvres et les dates des autres. Virgile, au moins, pensait au jugement d'Homère, et Horace - à Sappho… Ovide a raison : « Qui n'est pas d'aujourd'hui, sera encore moins de demain » - « Qui non est hodie, cras minus aptus erit ». Quant à l'avenir, tout bon art devrait se fier à la « poste de la bouteille », Celan (Flaschenpost), le « pays du cœur » (Herzland) ne manquant pas de rivages. | | | | |
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| hommes | | | Dans les leçons d’Histoire on suivait jadis les pas de la musique : dans les poèmes, dans les passions. Aujourd’hui, on suit l’histoire des circuits commerciaux ou des avancées technologiques. Dans la mémoire des hommes, Watt finira par supplanter Homère, et la route de la soie – le chemin de Golgotha. Le Temps ne connaît plus que les horizons, il oublia les firmaments. | | | | |
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| hommes | | | Le nombre des contemporains, admirateurs des belles plumes, est le même, aujourd’hui, qu’aux époques d’Homère, de Shakespeare, de Nietzsche, de Valéry. C’est le nombre des candidats et, surtout, les critères d’excellence qui changèrent : le marchand, le footballeur, le chanteur, le journaliste évincèrent le poète, le philosophe, l’intellectuel. | | | | |
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| hommes | | | Le héros d'aujourd'hui serait un investisseur ou un épicier. Le héros de jadis, « Odysseus vole, pille, tue, mais il ne commerce pas ! » - Homère. Mais ni l'un ni l'autre ne fabriquent. | | | | |
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| hommes | | | Non seulement les noms mêmes d'Homère ou de Shakespeare seront, un jour, oubliés, mais on ne comprendra plus les raisons de leur ancien prestige, puisque tout souci de la forme sera entièrement remplacé par celui du format. | | | | |
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| horace | | | Vixere fortes ante Agamemnona multi ; sed omnes inlacrimabiles.
Nombreux furent les grands bien avant Agamemnon, mais aucune voix ne les a pleurés. | | | | |
| | hommes | | | Depuis Homère, pour maintenir son nom au-delà de son heure ultime, l'homme, prince ou vilain, en appelait au poète ou à la pleureuse. Fini, son besoin de mythes ou de message. Aujourd'hui, tous ses soucis sont confiés à son argentier, pour régler le rite et le legs. Plus de pleurs ni de rires organiques, sur la grandeur défunte mécanique ; des registres ou plaques robotiques suffisent. | | | | |
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| marx k. | | | Ob die Ilias möglich wäre mit Pulver und Blei ?
L'Iliade serait-elle possible avec la poudre et le plomb ? | | | | |
| | hommes | | | On verrait moins de rouerie et plus de doute, comme on le vit dans Guerre et Paix. Mais avec l'atome et l'ordinateur elle serait un concis compte rendu de mission. Homère compare souvent le trépas de ses héros avec la chute des arbres ; aujourd'hui, on penserait plutôt à l'abattoir. | | | | |
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| intelligence | | | La notion de problème, c'est à dire de requête formulée dans un langage rigoureux, permet de distinguer deux types de beauté : des mystères, c'est à dire des étonnements intraduisibles en problèmes, et des solutions des problèmes grandioses. Le monde est beau et par ses poèmes et par ses théorèmes ; on trouve de la beauté aussi bien chez Homère, Dante, Rilke que chez Diophante, Fibonacci, D.Hilbert. | | | | |
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| intelligence | | | Les vrais penseurs tirent leur généalogie des mystiques laconiques, tel Héraclite, mais le discoureur, avec Socrate et Platon, apporta l'étalage et le développement. Le discoureur, contrairement au penseur, est celui qui a besoin de modèles d'univers pour faire valoir ses pensées. C'est avec Aristote que le terne penseur éclipse, hélas, les brillants discoureurs, d'Homère à Platon. Il faut reconnaître, que les temps modernes, avant de sombrer dans la grisaille compacte, et à perte de vue, des ternes discoureurs, connurent quelques brillants penseurs. | | | | |
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| péguy ch. | | | Rien n'est plus vieux que le journal de ce matin, et Homère est toujours jeune. | | | | |
| | ironie | | | Ne nous trompons pas de critère : Homère est bien vieux et le journal de ce jour ne peut être que de notre temps. Seulement, il y a celui qui cherche ses contemporains dans la rue et celui qui trouve des acteurs de sa vie jusqu'aux arènes de Troie ou en proie aux sirènes. Alexandre le Grand, sur la tombe d'Achille, l'envia : « Heureux garçon, tu eus Homère, pour chanter ta gloire ! ». | | | | |
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| mot | | | Personne ne rit chez Homère ; l'amour, chez Platon, n'est que charnel ; l'enfer de Dante n'est pas plus effrayant qu'un musée minéralogique (où Dante se serait promené en touriste – Péguy ; « les formes et couleurs de la poésie de Dante sont de nature géologique » - Mandelstam - « Стихи Данта сформированы и расцвечены геологически ») - et l'on en garde le rire homérique, la passion platonique, la vision dantesque. Se méfier des adjectifs, cette cinquième colonne du hasard antonomastique. La traîtrise des noms est moins déroutante, quoique vous chercheriez en vain l'âme dans De l'âme d'Aristote (que, bizarrement, vous trouverez dans Cité de Platon), ou la nature dans Sur la nature de Parménide ou dans De natura de Lucrèce, ou la logique dans la Science de la Logique de Hegel. | | | | |
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| mot | | | D'étranges trajectoires suivirent, dans l'Antiquité et au Moyen-Âge, les termes – philosophe, astrologue, mathématicien, géomètre. On appelait le philosophe – géomètre, l'astrologue – mathématicien, le mathématicien – philosophe et le géomètre – astrologue ! « Homère fut un astrologue » - Héraclite ! | | | | |
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| mot | | | Si l'âme est dédiée aux ombres, le cœur, lui, est source de lumières. Mais sa lumière passe par quatre prismes radicaux avant de laisser son empreinte langagière : la volonté l'assagit, la raison interroge la volonté, les objets extorquent leurs références, la langue modèle les références. Comment s'étonner, que la bouche ne s'accorde jamais avec le cœur ? « Je hais comme les portes des Enfers celui dont le cœur n'est pas d'accord avec la bouche » - Homère. | | | | |
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| mot | | | Il y a le monde de la Loi et le monde de la Beauté ; la mathématique universelle aide à comprendre le premier et la littérature individuelle chante le second. Il y a une concordance merveilleuse entre le libre arbitre mathématique et l’objectivité du monde ; mais aucune alliance ne peut subsister entre la liberté du mot et la nécessité du monde. Dans ce dernier cas, on abandonna le chant au profit du récit ; mais dans le genre discursif le journaliste est en train de surclasser Homère ; tandis que les alliances avec des dieux se raréfient, et les voyages lointains n'apportent que des améliorations à la technique de tissage. Toute belle Hélène devint patiente Pénélope. | | | | |
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| noblesse | | | La jeunesse, c'est un bonheur voué aux yeux ouverts, la caresse aussi réelle que la peau ; la maturité - la béatitude réservée aux yeux fermés, toute caresse naissant et croissant dans l'imaginaire. Odysseus ou Homère. | | | | |
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| noblesse | | | Peu m'importe, quelles négations ou proclamations je lis sur ton bouclier ; je ne peux deviner ton véritable défi que par ta manière de te désarmer et de te taire, devant la vie et devant l'esprit. Que tes ailes te servent de panache et te portent loin des lieux, marqués par les armes, à l'opposé d'Achille : « Achille, divin preux, sent que ses armes le portent ; il croit avoir des ailes » - Homère. | | | | |
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| noblesse | | | Les feuilles, frémissant de leurs inconnues, donnent de l'élan à l'arbre, qui cherche à s'unifier avec le monde ; quand elles sont en hauteur, elles deviennent des ailes, - l'arbre retrouve la montagne. « Les hommes sont semblables aux feuilles des arbres » - Homère. | | | | |
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| noblesse | | | Ma préférence va plus souvent aux ruines, au détriment des chemins, puisque j'ai deux locataires à héberger : le sentiment sédentaire et la pensée nomade, un aveugle et un boiteux, le premier accédant tout de même au regard, le second - à l'humilité. Séparés, ils se prennent pour voyant ou métronome. Je les laisse ensemble : le sentiment-maître apportant des images, la pensée-servante - un contact avec la réalité. L'imaginaire d'Homère, le réel de Byron - se fraternisent. « Dans le domaine du sentiment, le réel ne se distingue pas de l'imaginaire » - Gide. | | | | |
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| noblesse | | | Heureux temps anté-diluvien, où l'on pouvait se rendre aux Enfers et puis retourner dans ses pénates ! Et dire, orgueilleusement : « Plutôt être fermier au royaume des vivants, que roi au royaume des ombres » - Homère. Dans ton étable, tu ne manqueras ni de bougies ni de fourrage ; plutôt garder mes ombrages et mon effigie, dans ma Tour abolie. | | | | |
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| noblesse | | | Le plus clair de mon temps se passe dans la demeure, bâtie et animée par les autres ; les heures obscures et rares, c'est à dire les meilleures, je les vis dans mes ruines, dont les portes et fenêtres sont condamnées par mes contraintes, et mes moyens m'y ouvrent le ciel, où scintille mon but, mon étoile. Tant de nigauds, n'acceptant pas le monde et refusant d'y bâtir leur maison, continuent d'habiter leurs cellules communautaires. Ce n'est pas par rejet du monde que je me réfugie dans ma résidence secondaire ; dans les deux lieux règne mon acquiescement : au monde de l'esprit divin et à celui de mon âme. Et qu'il est beau, ce rêve du monde, parmi « ses propres ruines, éprouvées par l'âge, mais toujours majestueuses » - Homère. | | | | |
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| noblesse | | | Une feuille, que ce soit en botanique ou en cognitique, est insertion d'une nouvelle variable dans l'arbre géniteur. En matières humaines, la génétique a le même caractère : l'homme, qui n'émet que des constantes, n'exprime que sa facette commune, appelée les hommes. Pour se rapprocher de la facette surhomme, il doit devenir créateur de variables : « Le commencement de l'homme est le même que celui d'une feuille » - Homère. | | | | |
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| noblesse | | | Depuis que les Grecs donnèrent la palme à la paix d’âme champêtre, narrée par Hésiode, au détriment du combat céleste trépidant, chanté par Homère, leurs philosophes se mirent à prôner l’impassibilité historique et à condamner les passions poétiques. | | | | |
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| noblesse | | | Dès que notre conscience est attirée vers la hauteur, elle produit des rêves, c’est la définition même du rêve ; Homère appelait celui-ci – un être ailé. | | | | |
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| russie | | | La mesure du gouffre creusé entre l'Europe et la Russie par le règne du goujat : je n'ai aucune peine à tracer un chemin, qui mène de Byron à Lermontov, sans ruptures ; de la conscience historique de Soljénitsyne je n'arrive pas à atteindre même les Valaco-Bohémiens Conrad, Kundera ou Cioran, quoique sa conscience tout court en fasse un Dante homérique, toujours dans l'infernal ou dans l'épique. | | | | |
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| russie | | | Les grands artistes russes ne se mêlaient jamais à la multitude. Quel contraste avec l'Europe, où l'incrustation de fait se faisait sans peine et en pleine foire ! Pascal et son commerce de fiacres, Baudelaire, avec son Moniteur de l'épicerie, Claudel et la Mystique des bijoux Cartier, et même Valéry aux Louanges de l'eau de Perrier. Et pourtant, le héros russe le plus byronien, Eugène Onéguine, se moque d'Homère et admire A.Smith. | | | | |
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| solitude | | | Le cercle de la solitude est mal dessiné dans : « sans lignage, sans loi, sans foyer » (Homère). Je me connais une nette parenté, au passé ; je reconnais un haut ordre, au présent ; je me prépare au grand séjour au futur. La solitude est l'impossibilité de les réunir au même lieu, au même moment. | | | | |
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| solitude | | | Mieux je protège mes yeux, face à la déferlante des choses, plus pénétrant sera mon regard ; mieux je suis coupé du bruit du monde, plus pure sera ma musique ; l'Homère aveugle et le Beethoven sourd me montrent de beaux exemples des contraintes salvatrices. | | | | |
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| solitude | | | La plus horrible des unions (et non pas des fraternités) est l'union des brillants, puisque « l'union, même de la médiocrité, fait la force » - Homère - et la noblesse consiste à chanter la faiblesse. Prôner l'union voudrait dire, qu'il ne reste plus rien à défier, le bon défi étant toujours personnel. La force, jadis, résidait dans l'individu ; aujourd'hui, elle n'émane que des organismes - la raison première de la mauvaise presse du solitaire. | | | | |
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| solitude | | | Une journée-fraternité, journée de rare intensité : le matin - dans les collines, au-dessus du toit tranquille de Valéry ; l'après-midi - traduire du Mandelstam se fraternisant avec Homère ; le soir - serrer la main fraternelle de R.Debray ; la nuit - suivre l'agonie de J.Ferrat. Dans ma jeunesse moscovite, seul et aux abois, j'écoutais la belle voix de J.Ferrat me chanter la France, celle qui m'attendait. Celle qui vint à ma rencontre, porta le nom de R.Debray, mon frère. Je ne fus jamais moins orphelin, avec ma mère adoptive, la France, qu'en compagnie de ses deux plus belles voix. | | | | |
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| solitude | | | Qui prêterait attention aux états d'âme gémis par un anachorète carthaginois ? Même pour décorer les chars des Romains triomphants, on ne recherchait que des généraux ou de la soldatesque. Mon livre va sombrer comme tout souvenir phénicien, puisque les cendres de son oiseau éponyme ne toucheront plus la terre. La Didon du bûcher (Homère) ou la Didon abandonnée par Énée sur une île déserte (Virgile). Mais je dois tout faire pour « qu'à la vie solitaire corresponde un livre solitaire »*** - Pétrarque - « quo silicet solitarie vite solitarius liber esset ». | | | | |
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| platon | | | Homère réduit l'esprit du lecteur à l'état des ruines. | | | | |
| | solitude | | | D'autres proposèrent des phalanges, casernes ou étables avec beaucoup plus de succès. Mais quelle demeure peut se transformer aussi facilement en château en Espagne que les ruines homériques ? | | | | |
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| | solitude | | | Qui se cachent dans ma propre voix et que je démasque, confus, désarçonné, écœuré. Surtout, s'« il n'est permis à personne de dire : je suis moi » ! D'où l'intérêt du purgatoire de l'ironie. Qui dit, que je ne suis pas meilleur que les Autres. L'enfer d'aujourd'hui, c'est l'enfer des mêmes, l’absence d’altérité. L'enfer homérique : « au-delà du Peuple des Songes, ce circuit astral, conduisant à la vraie vie », traite les autres de - « génération, à travers laquelle passe l'errance de l'âme », pour nourrir nos songes. « Qu'aimes-tu dans les autres ? Mes espérances »* - Nietzsche - « Was liebst du an Anderen ? Meine Hoffnungen ». | | | | |
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| beethoven l. | | | Durch Leiden Freude.
Par la douleur vers la joie. | | | | |
| | souffrance | | | On apprend aujourd'hui toutes les langues étrangères, y compris celle de la musique, - sans douleur. L'effort humilie l'essor. Et l'on ne retire de cette sueur aseptisée que … de la connaissance : « Par la souffrance – à la connaissance » - Homère (comme le voient aussi le Prométhée d'Eschyle, le Faust de Goethe et le Manfred de Byron). | | | | |
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